mercredi 16 mai 2012

Pour un centre libre

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Mercredi 16 mai 2012 :
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"Pour un centre libre, avec l'aide duquel on pourra faire face demain à des défis redoutables"
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Jean Peyrelevade a appelé à la construction d'un "Centre libre de ses pensées et de ses actes", qui travaillera de façon constructive avec la nouvelle majorité, dans une tribune publiée par Le Monde, lundi 14 mai.
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"Comme des millions de Français qui, tous ensemble, ont formé une majorité, je me félicite de la victoire de François Hollande. Mais le nouveau président est trop avisé pour ne pas savoir qu'elle est à la fois superbe et fragile.
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Car l'exploit ne peut faire oublier les mouvements de fond. Historiquement, sociologiquement, électoralement, la France n'est pas à gauche. La Ve République a aujourd'hui plus d'un demi-siècle. Sept présidents se sont succédé à sa tête. Cinq de droite et deux de gauche. Les chiffres sont éloquents : les rapports de durée reflètent les rapports de forces.
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Encore faut-il noter que les deux champions victorieux, François Mitterrand et François Hollande, ont bien entendu été élus sur leur mérite propre, mais avec un point commun : ils ont tous deux battu un président sortant affecté par l'usure du pouvoir et dont la personnalité avait suscité un véritable rejet dans une large partie de l'opinion publique.
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Comment pouvez-vous oublier, me dira-t-on, que la gauche a, depuis dix ans, emporté toutes les élections locales ? S'appuyant sur les municipalités, les départements, les régions successivement conquis, n'a-t-elle pu ainsi aller jusqu'à s'emparer du Sénat ? Ne détient-elle pas aujourd'hui tous les pouvoirs, à tous les niveaux ? Le paradoxe n'est qu'apparent. La démocratie française, plus qu'aucune autre, sanctionne volontiers qui exerce le pouvoir le plus élevé, le pouvoir souverain.
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La droite ayant gagné trois fois de suite l'élection présidentielle était depuis dix ans, sans interruption, en charge des affaires de l'Etat. La gauche, force d'opposition, a triomphé aux élections intermédiaires. Le balancier va maintenant partir dans l'autre sens.
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Qui ne s'étend pas recule. La gauche, si elle reste enfermée dans ses frontières traditionnelles, dans sa situation en fait minoritaire, n'aura ni la capacité dans l'immédiat de gouverner un pays plongé dans une crise profonde, ni, à plus long terme, celle de se maintenir de manière durable aux commandes de l'Etat. Un quinquennat et puis s'en va ? L'échec serait encore plus retentissant que ceux de Valéry Giscard d'Estaing, en 1981, ou de Nicolas Sarkozy en 2012.
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Signe spectaculaire
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Cependant, un fait important, qui peut devenir décisif, s'est produit pendant cette campagne. Le centre, jusqu'ici considéré comme une marche de la droite, a manifesté de manière explicite sa volonté d'indépendance. La décision personnelle de François Bayrou appelant à voter pour François Hollande en a été le signe spectaculaire. Les reports de voix en faveur de ce dernier et les votes blancs comme les abstentions d'une majorité des électeurs du MoDem ont joué leur rôle dans l'élection du nouveau président.
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Indépendance ne veut pas dire ralliement. Pas plus ici que là. Mais la gauche de gouvernement, dont le pays attend aujourd'hui qu'elle montre ce qu'elle sait faire, devrait avoir à coeur de consolider cette évolution. Dans l'intérêt de la France comme dans le sien propre. Un centre libre de ses pensées et de ses actes, un centre avec l'aide duquel on pourra, le cas échéant, faire face demain à des défis redoutables n'est-il pas préférable à un centre inféodé à droite et donc hostile par principe ?
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François Bayrou, le premier, a fait mouvement. Je m'adresse à mes amis sociaux-démocrates, à mes amis réformistes : c'est à eux maintenant de bouger."
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Jean Peyrelevade,
Ancien directeur-adjoint du cabinet de Pierre Mauroy (1981-1983),
Conseiller de François Bayrou
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