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mercredi 7 septembre 2011

Jour après jour, au fil de la politique

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Mercredi 7 septembre 2011 :
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La rubrique que vous attendez tous : l’actualité vitrollaise et nationale (politique ou non) au jour le jour. Les coups de cœur comme les coups de gueule, les questions comme les réponses !
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Samedi 3 septembre : Et si l’on reprenait cette rubrique en parlant cinq secondes de sécurité ?

130 policiers pour 57421 habitants sur une superficie de 70,24 km2
Soit un policier pour 442 habitants et 540 m2
166 policiers pour 65726 habitants sur une superficie de 106,79 km2
Soit un policier pour 396 habitants et 643 m2

Au niveau population, un « mieux » certain et indéniable mais un tiers de superficie en plus pour un quart de policiers supplémentaire.

Dans l’absolu, rien de bien choquant sauf que Vitrolles récupère sous son giron la totalité de la surface de la plus grande zone commerciale de France auquel s’ajoute le handicap de ne disposer que d’un seul commissariat satellite, en l’occurrence celui des Pennes-Mirabeau ouvert cinq jours sur sept, en deux plages horaires le matin et l’après-midi.

Sans oublier le détachement de la circonscription de Vitrolles vers la zone d’Aix-en-Provence, en lieu et place de celle de Martigues, chose par contre beaucoup plus logique au vu de nos problématiques.

Je vais attendre pour juger sur pièce mais disons que je ne suis pas du tout convaincu par ce nouveau déploiement.
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Dimanche 4 septembre : Je pense que n’avons pas fini de manger du DSK à tous les journaux télévisés. Ce qui est très amusant par contre, quand on dispose du satellite, c’est de regarder les événements français vus par les médias étrangers. Et, généralement, on tombe de haut.

Ainsi, déjà, lorsque le juge new-yorkais avait abandonné les poursuites à l’encontre de l’ancien président du FMI, autant les télévisions françaises mettaient en avant le terme « blanchi », autant les médias étrangers (de Telesur à Russia Today en passant par NHK, CNN, Al Jazeira ou même Euronews) insiste lourdement sur le fait de l’existence de la relation sexuelle et sur l’ignorance des événements dans la chambre. Tous les médias, sauf les français, pointent le fait que la témoin n’est plus crédible à cause de ses fraudes à la Greencards et non sur ses mensonges éventuels ce jour là. Tous les médias, sauf les français, insiste lourdement sur le fait que les accusations persistent malgré l’abandon des poursuites.

Le retour de notre DSK national dimanche matin est le summum dans le déchainement des médias étrangers contre nous, français, qui faisons un accueil triomphal à un « sexual pervert » comme le traita une des chaines étrangères mentionnées plus haut.

Pour ma part, je ne dirais qu’une chose : ras la casquette de DSk. Qu’il reste chez lui et qu’il n’em* plus personne !
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Lundi 5 septembre : Une journée de reprise des plus dures après trois semaines de vacances mais surtout la découverte que quelque chose a changé à Marseille : la bascule des rotations des car-ferries et les embouteillages liés aux flux des embarquement/débarquement des navires accostant au GPMM, désormais en fin d ‘après-midi et non le matin avec le retour des vacanciers sur notre territoire.
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Donc, en ce lundi 5 septembre, pas moins de trois car-ferries ont touché les bassins de la Joliette en fin d ‘après-midi libérant au niveau de l’ex J-4, bien entendu pile poil au moment de la sortie des bureaux, pas moins de deux milles voitures. Oui, vous avez bien lu : deux milles véhicules supplémentaires à une heure de pointe.
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Imaginez deux secondes le boulevard Schuman, la Place de la Joliette et le Boulevard de Dunkerque, sans oublier l’engorgement journalier du Boulevard des Dames, habituellement saturés à partir de dix sept heures, recevant soudainement deux mille voitures supplémentaires, voitures de surcroit ne sachant pas quelle direction prendre, s’arrêtant en plein milieu pour demander leur chemin, en double ou en triple pour attendre un membre de la famille dans une autre voiture, se fiant uniquement au GPS pour atteindre l’autoroute ….
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Premier bilan pour ce premier jour de travail : quarante neuf minutes pour aller de la Cathédrale à l’entrée de l’autoroute !
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Je demande à ce que le grand malade qui a établi ce plan de circulation, qu’il soit de la Mairie, de MPM, du Conseil Général, de la DRIRE ou de tout autre organisme, soit condamné un soir à se farcir la traversée J4 – A55 pour connaitre enfin le calvaire des usagers !
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Mardi 6 septembre : Grâce à « Marsinfo », je découvre la convocation de Jean-Noël Guerini par le juge Duchaine.

Comme je l’ai fait jusqu’à présent, aucun commentaire sur cette lettre mais un simple espoir en guise de clin d’œil à quelqu’un qui va certainement se reconnaître : l’heure est peut-être arrivée pour un changement de cadre et le rajeunissement des équipes du CG13.

La carte dans la manche doit désormais entrer en jeu !
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lundi 5 septembre 2011

1935 : L’affaire MALMEJAC – Conclusions

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Lundi 5 septembre 2011 :
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Tous les lundis, durant cet été 2011, je vais explorer les méandres d’une affaire qui a bouleversé une longue semaine la ville de Marseille, et au-delà, la France entière : « l’affaire MALMEJAC » ou l’enlèvement d’un enfant en plein jour et au cœur même de la cité phocéenne.
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Ordre des publications :

Lundi 4 juillet 2011 : Présentation
Lundi 11 juillet 2011 : L’Enlèvement
Lundi 18 juillet 2011 : Premières recherches
Lundi 25 juillet 2011 : La piste d’Endoumes
Lundi 1er aout 2011 : La piste de Saint-Just
Lundi 8 aout 2011 : Les médias s’en mêlent
Lundi 15 aout 2011 : Le Boulevard des Fauvettes
Lundi 22 aout 2011 : Devant la justice
Lundi 29 aout 2011 : Un dernier rebondissement
Lundi 5 septembre 2011 : Conclusions

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Après plusieurs semaines, nous voici donc à la fin de ce tragique fait divers marseillais. Avant de vous faire découvrir, en guise de conclusion, comment Léon BANCAL du Petit Marseillais ra conta à ses lecteurs les retrouvailles entre le petit Claude et son près, je pense qu’il est temps d’apporter une brève conclusion à toute cette histoire.
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Cette affaire toucha au plus profond de ses fibres la vieille cité phocéenne. Non seulement on avait touché à l’un de ses enfants mais en plus c’était pour une raison sordide : l’argent. Et cela était totalement inadmissible pour une population où l’enfant est le centre de tout.

C’est pour cette raison que la ville entière se mobilisa pour retrouver Claude Malmejac et que l’on vit une association improbable pour le retrouver : la police et le grand banditisme réunis dans la recherche de la vérité !

L’effervescence policière nuisait aux affaires du grand banditisme. Outre le fait qu’au plus vite l’enfant serait retrouvé, au plus vite les affaires pourraient reprendre, Paul Carbone et Louis Spirito supportaient mal qu’un inconnu vienne chasser sur leurs terres. Car il ne leur avait pas fallu plus d’une demi-journée pour apprendre que la pègre marseillaise n’était en rien mêléz à cet enlèvement, information très vite relayée à la police. Comment passer sous silence les descentes des hommes de ces figures locales dans tous les clandés de la région à la recherche d’informations pouvant aider à retrouver l’enfant ? Comment passer sous silence la soudaine osmose entre toutes les couches de la population en une seule inquiétude : où était l’enfant ?

En cela ce rapt fut une affaire des plus remarquables.

I/ Le procès des kidnappeurs
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Il se déroula sept mois plus tard au Tribunal d’Aix-en-Provence, du 23 au 26 juin 1936. André Clément, le fils, et Marie Cardin, la mère ont comparu.

Les deux accusés vont tenter, durant toute la durée du procès, de limiter leurs rôles, l’une jouant sur son grand âge, l’autre sur sa position de chômeur, mais le juge a tôt fit de démontrer le vrai visage des accusés en rappelant les affaires de détournement d’argent de Dieppe et Rouen, l’agression et le chantage contre Mr Samama et la tentative d’enlèvement des enfants Cezily.

L’avocat-général Lacaux va être sans pitié et après une terrible plaidoirie mettant en avant les plus noirs dessins et les plus perfides traits de caractères des accusés, il va réclamer pour chacun la peine maximale correspondant aux inculpations.

André Clément risque dix ans de travaux forcés pour l’enlèvement du petit Claude Malmejac. Mais comme le jeune homme est aussi accusé de tentative d’enlèvement des enfants Cezily, le ministère public peut doubler la mise et ainsi réclamer vingt ans, chose dont il ne va pas se priver. D’autant plus que les violences faites dans l’affaire Samana permettent de consolider cette demande.

Marie Cardin, étant une femme, et ne pouvant être envoyé au bagne, le ministère public réclame vingt ans de réclusions tout en mettant en garde les jurés sur le caractère dangereux de cette vieille femme et donc de lui éviter les circonstances atténuantes.

Les avocats de la défense, Maitre Verdot-Martino et Maitre Grisoli vont tout tenter, dans deux plaidoiries émouvantes, tentant de démontrer combien « l’absence du père a pu peser sur le jugement du fils », comment les conditions de vie des deux accusés étaient précaires, comment la destruction de la famille avait détruit aussi « le discernement de ces deux êtres ballotés par la vie ».

Après ces plaidoiries, la parole est donnée aux accusés. Marie Cardin va se plonger dans un profond mutisme. André Clément, de son côté, va tenter de s’excuser, sans trop arriver à convaincre d’ailleurs.

« J’exprime ici des regrets pour ma mère et pour moi. Je suis le seul coupable. J’ai entrainé ma mère par tous les moyens en mon pouvoir. Si elle est coupable, ce n’est que de m’voir trop aimé. »

Il ne faudra qu’une heure aux jurés pour répondre aux onze questions qui leurs sont posés. Et les réponses sont accablantes : coupables aux onze questions sans aucune circonstance atténuante.

Dans la foulée, André Clément est donc condamné à vingt ans de travaux forcés au bagne de Cayenne tandis que Marie Cardin écope de vingt ans de réclusions.

II/ Le durcissement de la loi

Au moment même où se déroule le procès des kidnappeurs, le parlement adopte la modification de l’article 355 du Code Pénal concernant le durcissement des peines lors de kidnapping.

Jusqu’à présent, l’article 355 du code pénal concernant « les coupables d’enlèvement, de recel ou de suppression d’enfant », ne prévoit que des peines de réclusion ne pouvant excéder dix ans. Si les circonstances atténuantes peuvent être avancées, cette peine est ramenée à cinq ans.

Dans le cas de l’enlèvement de Claude Malmejac, la justice a du recourir à des artifices pour les condamner plus durement. Pour éviter cela à l’avenir, le député mais aussi avocat Georges Pernot, qui de surcroit a tenu les reines du ministère de la Justice de novembre 1934 à mai 1935, établie un rapport puis une proposition de loi qui est justement adopté en même temps que le procès.

« L’article 355 du code pénal est modifié ainsi qu’il suit :

Article 355 : Si le mineur ainsi enlevé ou détourné est âgé de moins de quinze ans, la peine sera celle des travaux forcés à perpétuité.
La même peine sera appliqué quel que soit l’âge du mineur si le coupable s’est fait payer ou a eu pour but de se faire payer une rançon par les personnes sous l’autorité ou sous la surveillance desquelles le mineur était placé.
L’enlèvement emportera la peine de mort s’il a été suivi de la mort du mineur. »

Deux recommandations accompagnent cette proposition de loi :
George Pernot demande tout d’abord que les affaires d’enlèvement bénéficient d’une « procédure rapide » permettant de juger les kidnappeurs immédiatement. En guise de deuxième recommandation, il réclame une censure ferme et sans exception des films cinématographiques faisant l’apologie ou montrant ce type de comportement. Il s’appuie sur le fait qu’André Clément a toujours dit, pour excuser son geste, qu’il avait trouvé son inspiration dans les films.

L’article 355 sera adopté par les deux chambres à l’unanimité et publié fin juin au journal officiel de la République française.

III/ Récit de Léon Bancal publié par le « Petit-Marseillais » le 3 décembre 1935 :

Pour terminer cette étude, je ne peux résister à vous faire partager ce récit de léon Bancal, rédacteur en chef du

« Le hasard m'a fait vivre hier après-midi quelques minutes qui comptent à la fois comme les plus angoissantes et les plus émouvantes de ma vie de journaliste.

Un coup de téléphone venait de nous apprendre l'arrestation des ravisseurs du bébé. Des circonstances de cet événement, nous ne savions rien d'autre, sinon que l'un des deux avait été tout près de tuer l'enfant. Nous cherchions avec l'anxiété que l'on devine à obtenir la confirmation de la nouvelle et des détails complémentaires lorsque le docteur Malmejac apparut.

Que de fois déjà il était venu chez nous, apportant quelques uns de ces messages dont il espérait bien qu'ils finiraient par lui permettre de retrouver son cher petit.

Il tenait à la main une de ces papiers. Je ne le laissais par parler.
- C'est donc vrai ! lui lançais-je.
- Quoi donc ?
- On l'a retrouvé ?
- Mais non … Je viens de chez moi et je vous apporte …

Je crois qu'à ce moment je lui crie en plein visage : Votre fils est retrouvé ! venez !
Nous bondissons dans l'escalier. Il m'interrogeait : Où allons nous ?

Nous traversions le cours du Vieux-Port et prenions un taxi dont le chauffeur a du d'abord croire que nous avions perdu la raison.

Quels instants cruels dans cette voiture pendant le trajet du Petit Marseillais à l'Hôtel de Police.
- Oui, disais-je, votre petit Claude a été retrouvé. La vieille femme a été arrété. Son complice aussi.
- Non ! Ce n'est pas vrai ! Qui vous l'a dit ?
- Un coup de téléphone …
Puis, dans la pénombre du taxi, je sentais la main du docteur qui serrait mon bras. Il me demandait : Vivant ? est-il vivant ?
- Oui docteur, il est vivant, vous allez le revoir !
- Je ne le crois plus !
Et à chaque instant, cette voix brisée de larmes répétait : Vous êtes sûr qu'il est vivant ?
- Je vous l'assure. Ne lui ai-je pas donné ma parole qu'il allait retrouver son enfant vivant ?

Hélas ! Comment pouvais-je être sûr que l'enfant était sain et sauf ? J'avais beau me rappeler les mots entendus au téléphone. J'avais beau m'assurer moi-même que le collaborateur qui nous avait avisés était un homme sérieux …

Si par malheur …

J'en étais à me demander si cet homme à qui j'avais promis qu'il allait retrouver son enfant allait le retrouver vivant !

Minutes mortelles. J'aurais voulu, tandis que nous approchions du Fort Saint-Jean, parler d'autre chose pour chasser l'angoisse de ce père et la mienne …

Mais, sans cesse, il répétait : Vous êtes sûr qu'il est vivant ?

Et je répondais : Oui … Oui … comme on répond à un enfant pour le consoler.

La rue de l'Évêché était noire de monde. A peine étions-nous descendus que la foule, sans rien savoir, avec son instinct pénétrant, avait deviné qui était mon compagnon.

"le père … le père !" entendait-on circuler et les braves gens qui étaient là s'effaçaient pour nous laisser passer.

En quelques enjambées, nous arrivâmes à la porte de l'appartement du Chef de la Sûreté, devant laquelle journalistes et photographes montaient une impatiente garde.

La porte s'ouvre et je n'ai que le temps d'apercevoir au bras d'un inspecteur un bébé palot, vêtu de bleu, coiffé d'un béret d'angora blanc. Un cri : Mon petit Claude !

Le docteur serre contre sa poitrine l'enfant. Il pleure. Le petit pleure et, joue contre joue, le père mêle ses larmes à celles de son fils.

Nous étions là, une dizaine de personnes. Je voudrais savoir quel est celui d'entre nous qui n'a pas eu la gorge sèche et qui n'a pas sentie ses yeux se mouiller …

Ceux qui ont vu cet homme presser contre sa poitrine ce bébé et qui ont entendu la petite voix répéter : Papou … Papou n'oublieront pas de sitôt cet instant.

Puis je n'ai plus rien vu, sinon le père assis sur une chaise, mitraillé par les photographes qui avaient réussi à entrer. Invitant le chef de la Sûreté à s'assoit à coté de lui, il riait à travers ses pleurs et son gosse sur les genoux, il répétait : Allez-y … aujourd'hui, autant de photos que vous voudrez ! »
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Léon Bancal
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dimanche 4 septembre 2011

L’info du dimanche : Manuel de sciences, polémique surréaliste

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Dimanche 4 septembre 2011 :
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La rubrique dominicale de mon blog, « l’info du dimanche », cette information locale, régionale ou nationale glanée dans la presse et qui m’a fait bondir de colère ou de joie durant la semaine.
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Il y a quelques jours, quatre vingt députés appartenant pour la plupart à la mouvance réactionnaire de la « Droite populaire », créé pour faire concurrence aux idées frontistes, se sont positionnés par rapport aux nouveaux manuels de sciences, devant entrer en vigueur dès cette année.

Donc, il demande tout simplement le retrait des manuels, le chapitre «Devenir homme ou femme» n’ayant, selon eux, pas sa place. Dans ce chapitre, les manuels expliquent « l’identité sexuelle » des individus autant par le contexte socio-culturel que par leur sexe biologique.
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Ces parlementaires, conduits par Richard Maillé, député des Bouches-du-Rhône, font ainsi écho aux critiques exprimées sur le même sujet au printemps par la direction de l’enseignement catholique.
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Dans ce papier, je ne vais pas polémiquer aujourd’hui sur le bien fondé de cette prise de position, simplement livrer à votre attention, l’interview donné au journal « Libération » par Richard DESCOINGS, directeur de Sciences Po Paris.
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Bonne lecture !
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Manuels de sciences : « c'est une polémique créée de toutes pièces »
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Pour Richard Descoings, directeur de Sciences Po Paris, la polémique sur l'enseignement de la théorie du genre en SVT est «contraire à l'esprit même de la recherche scientifique».
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En début de semaine, 80 députés de la majorité ont appelé au retrait des manuels de sciences de première ES et L. Le nouveau chapitre des programmes «Devenir homme ou femme» n'y a pas sa place, selon eux. Cette initiative a été soutenue par Jean-François Copé mercredi et n'est que l'énième rebond d'une polémique qui dure depuis juin dernier.
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Richard Descoings, directeur de Sciences Po Paris, première grande école à avoir rendu obligatoire l'étude des gender studies (parfois appelées «théorie du genre») et auteur d'un rapport sur la réforme du lycée en 2009, s'inquiète de ce débat biaisé.
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Êtes-vous surpris par cette polémique et par sa durée?
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Je ne suis pas étonné de sa durée et cela peut durer jusqu’aux élections présidentielles et législatives car je pense que c'est une polémique créée de toutes pièces. Ceux qui s'opposent au programme de SVT laissent entendre que les auteurs de ces programmes auraient pour but de nier la différence entre les hommes et les femmes et que cela serait contraire à la vérité scientifique. Le but n'est évidemment pas de nier une différenciation sexuée à la naissance. Porter le débat là-dessus n'a pas de sens. Plus exactement, cela n'a de sens que si l'on veut laisser entendre que les pensées secondes des auteurs de ces programmes sont troubles du point de vue de la morale publique.
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Or le sujet ce n'est pas du tout ça. Le sujet c'est: comment se fait-il que la France des années 2010 ait encore tant de retard dans la reconnaissance des femmes aussi bien dans leur rôle professionnel que dans leur rôle d'élues, de représentantes du peuple ou que dans leur rôle social?
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Cette question là, est-ce qu'elle est nouvelle, est-ce qu'elle vient des Etats-Unis?... Ce ne sont pas les gender studies qui ont inventé la construction par la société des rôles impartis à l'homme et la femme. Simone de Beauvoir – Le Deuxième Sexe c'était en 1949, pendant la IVe République – n'était pas Américaine et n'était pas dans la mouvance idéologique dénoncée aujourd'hui. Il y a une méconnaissance du fait que beaucoup de personnalités ont depuis longtemps constaté qu'on ne décrit pas le rôle de l'homme et de la femme de la même manière.
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Ce n'est d'ailleurs pas forcément condamnable en soi. Quand on constate, par exemple en Allemagne, que le taux d'emploi des femmes est moins important que dans les autres pays d'Europe parce qu'encore aujourd'hui il revient traditionnellement à la femme d'élever les enfants à la maison, cela signifie quelque chose sur l'état d'une société par rapport à la différence des genres. En France aujourd'hui, le congé parental est possible aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Reste que, quand un homme en réclame un, il y a dans son entreprise de la surprise. Tout ça donc n'est pas nouveau, tout ça ne vient pas des Etats-Unis mais vient de cette science formidablement dévelopée en France depuis Durkheim: la sociologie.
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Justement, l'un des arguments des opposants à ces manuels est de dire qu'on devrait en parler en sociologie, pas en SVT...
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Le progrès de la science est de ne plus créer de barrières étanches entre les différentes grands champs scientifiques. Dire qu'il y a des choses qu'on apprend dans telles disciplines ou pas, c'est nier que la vraie pensée scientifique associe toujours plusieurs sources de réflexion.
Si je ne me trompe pas, Pascal était d'abord un grand mathématicien. Je pense que, pour beaucoup aujourd'hui, c'est d'abord un grand philosophe. Leibniz était d'abord un grand scientifique. Léonard de Vinci était un grand ingénieur, beaucoup aujourd'hui pensent que c'était un grand peintre. Est-ce qu'on va expliquer qu'on doit ranger les uns ou les autres dans telle ou telle discipline? Ça voudrait dire que l'on range les savoirs disciplinaires dans des tiroirs. On tire un tiroir, on a une connaissance, et surtout pas de liens avec les autres. C'est exactement le contraire de l'esprit même de la recherche scientifique.
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Est-ce que derrière la critique de la théorie du genre que font ces députés ou ces associations, ce n'est pas l'acceptation officielle et tolérante de l'homosexualité qui pose vraiment problème?
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Il y a sans doute effectivement cette préoccupation de protéger notre saine jeunesse d'une orientation défecteuse... Outre le fait que l'apprentissage de la tolérance fait partie des missions de l'Education nationale, on peut douter de l'efficacité de l'omerta sur ces questions-là au collège et au lycée. Et à ma connaissance, ce ne sont pas des sujets pénalement sanctionnés. Alors pourquoi une omerta là-dessus?
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Sur votre profil Facebook, en réaction à cette polémique, vous avez demandé ironiquement «le retrait de Simone de Beauvoir des cours de littérature française» et d'autres livres.
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Je pense également qu'il est difficile d'étudier la tragédie classique française, Racine ou Corneille, sans parler de sexualité. On ne comprendrait pas tellement pourquoi Phèdre souffrirait tellement jusqu'à se tuer. On ne comprendrait pas tellement pourquoi Le Cid voudrait retrouver sa belle. Tout notre grande littérature intègre très largement les préoccupations de la séduction, de la sexualité, du désir. L'un des objets de la tragédie classique est justement lorsque les interdits moraux l'emportent sur les pulsions sexuelles.
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Lors de vos déplacements sur le terrain pour votre rapport sur la réforme du lycée en 2009, aviez-vous noté des attentes des élèves sur ces thématiques?
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J'avais noté des demandes de professeurs, notamment sur la violence, parfois verbale, souvent physique, que des jeunes filles pouvaient subir au collège et au lycée. Ils réclamaient l'attention des autorités publiques sur le fait que cette violence, notamment sexuelle, existe. Je pense que dans l'apprentissage des formes d'éducation globale, le respect dû à la personne et les notions de dignité humaine sont essentielles.
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Sciences Po vient de rendre obligatoire en premier cycle les «gender studies» et c'est une première pour une grande école. Est-ce que cela a été bien accepté par les élèves et le corps enseignant?
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L'idée est venue du corps académique. D'abord, un programme de recherche (PRESAGE) a été lancé et ensuite cela a été proposé au conseil de direction. Cela n'a provoqué aucune difficulté ni dans le corps enseignant ni dans le corps étudiant.
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samedi 3 septembre 2011

Une histoire de Haka …

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Samedi 3 septembre 2011 :
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Nous ne sommes qu’à quelques jours de l’ouverture de la coupe du Monde 2011 de Rugby qui va se dérouler en Nouvelle-Zélande.
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L’occasion de mettre en ligne le fameux « Haka » des All-Blacks lors d’un quart de finale contre la France en 2007, histoire de se mettre en jambe !
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Bon visionnage
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Lien internet de la vidéo :
http://youtu.be/ikIS9Ztvbpg
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vendredi 2 septembre 2011

La fin des vacances …

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Vendredi 2 septembre 2011 :
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Les vacances touchent à leurs fins et la rentrée politique approche à grand pas, programmée mardi prochain pour ce blog.

En ce premier vendredi de septembre, je vais commencer par une petite remise en jambe, en l’occurrence un petit rappel des articles qui ont été publié cet été sur mon blog pour vous permettre de rattraper votre retard.
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Bonne lecture
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Rubrique 1 : Histoire
1935 : l’Affaire Malmejac où l’enlèvement d’un enfant à Marseille en 1935
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Lundi 4 juillet 2011 : Présentation
Lundi 11 juillet 2011 : L’Enlèvement
Lundi 18 juillet 2011 : Premières recherches
Lundi 25 juillet 2011 : La piste d’Endoumes
Lundi 1er aout 2011 : La piste de Saint-Just
Lundi 8 aout 2011 : Les médias s’en mêlent
Lundi 15 aout 2011 : Le Boulevard des Fauvettes
Lundi 22 aout 2011 : Devant la justice
Lundi 29 aout 2011 : Un dernier rebondissement
Lundi 5 septembre 2011 : Conclusion (à paraître)
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Rubrique 2 : Histoire toujours
La revue de presse de l’été 1911 avec le camouflet d’Agadir, le vol de la Joconde et la pénurie d’eau à Paris, une petite revue de presse centenaire et cent pour cent subjective par le biais de la « bible » de la presse nationale de l’époque : « Le Petit Parisien »
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Vendredi 8 juillet 2011 : Semaine du 2 au 9 juillet 1911
Vendredi 15 juillet 2011 : Semaine du 10 au 16 juillet 1911
Vendredi 22 juillet 2011 : Semaine du 17 au 23 juillet 1911
Vendredi 29 juillet 2011 : Semaine du 24 au 30 juillet 1911
Vendredi 5 aout 2011 : Semaine du 31 juillet au 6 aout 1911
Vendredi 12 aout 2011 : Semaine du 7 au 13 aout 1911
Vendredi 19 aout 2011 : Semaine du 14 au 20 aout 1911
Vendredi 26 aout 2011 : Semaine du 21 au 27 aout 1911
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Rubrique 3 : L’info du Dimanche
La rubrique dominicale de mon blog, « l’info du dimanche », cette information locale, régionale ou nationale glanée dans la presse et qui m’a fait bondir de colère ou de joie durant la semaine.
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Dimanche 3 juillet 2011 : La suppression des trente cinq heures ?
Dimanche 10 juillet 2011 : Sarkozy et la sécurité : l’échec ?
Dimanche 17 juillet 2011 : Violences domestiques : la loi du silence
Dimanche 24 juillet 2011 : Un expatrié = une voix qui compte
Dimanche 31 juillet 2011 : La « Droite populaire » entend peser sur la campagne
Dimanche 7 aout 2011 : Un produit « vert » interdit !
Dimanche 14 aout 2011 : Fruits et légumes : les raisons d’une crise
Dimanche 21 aout 2011 : La fin de l’Internet illimité ?
Dimanche 28 aout 2011 : Casse tête Budgétaire en vue
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Rubrique 4 : Trois considérations personnelles
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Jeudi 14 juillet 2011 : Quelques considérations sur le 14 juillet
Mardi 19 juillet 2011 : Parlons commémorations et défilés militaires
Mardi 26 juillet 2011 : Clap de fin au CM
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lundi 29 août 2011

1935 : L’affaire MALMEJAC – Partie 8 – Derniers rebondissements …

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Lundi 29 aout 2011 :
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Tous les lundis, durant cet été 2011, je vais explorer les méandres d’une affaire qui a bouleversé une longue semaine la ville de Marseille, et au-delà, la France entière : « l’affaire MALMEJAC » ou l’enlèvement d’un enfant en plein jour et au cœur même de la cité phocéenne.
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Ordre des publications :

Lundi 4 juillet 2011 : Présentation
Lundi 11 juillet 2011 : L’Enlèvement
Lundi 18 juillet 2011 : Premières recherches
Lundi 25 juillet 2011 : La piste d’Endoumes
Lundi 1er aout 2011 : La piste de Saint-Just
Lundi 8 aout 2011 : Les médias s’en mêlent
Lundi 15 aout 2011 : Le Boulevard des Fauvettes
Lundi 22 aout 2011 : Devant la justice
Lundi 29 aout 2011 : Un dernier rebondissement
Lundi 5 septembre 2011 : Conclusion

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I / Gilbert et Marie Rolland ou André et Marie Clément ?

A la Sureté Marseillaise, le 3 décembre 1935 débute par un coup de théâtre inattendu avec un coup de téléphone en provenance de Rouen. En effet, Mr Cabanne, commissaire central à Rouen, appelait Mr Couplet, Chef de la Sureté à Marseille pour lui faire d’une bien curieuse histoire.

Ayant eu en lisant la presse, les photographies des ravisseurs, deux policiers rouennais, l’inspecteur chef de la Sureté Dorival et l’inspecteur Deveaux, qui en janvier 1934 avaient enquêté de concert sur une affaire d’extorsion de fonds et de faux et usage de faux, étaient sûr de les avoirs reconnus. Il s’agirait des deux fuyards recherchés dans cette affaire. Seul problème, les deux fugitifs ne s’appellent pas Gilbert et Marie Rolland mais Gustave André Clément et Eugénie Marie Carvin.

D’après la Sureté de Rouen, un mandat d’arrêt a été lancé par le juge d’instruction Tasniere en charge d’enquêter sur un détournement de fond effectué à l’encontre de la société de transit Paloumé-Lafresne, pas moins de 125000 francs qu’auraient empoché la mère et le fils, employé dans la société comme commis. Ils auraient détourné et encaissé deux chèques à la fin de l’année 1933, la société s’apercevant du détournement que le 19 janvier 1934. André Clément aurait aussi détourné 1500 francs du service de la voirie de Dieppe où il travaillait mais cette affaire a été classée sans suite après le retrait de la plainte de la mairie concernée.

D’après les renseignements complémentaires fournis par les services rouennais, Marie Carvin aurait divorcé au début des années vingt d’Edmond Clément, un capitaine au long cours respecté sur la place rouennaise. De cette union, elle aurait eu un fils, André, né le 8 avril 1909.

II/ La véritable identité des ravisseurs

Convoqué de nouveau devant le juge d’instructions en début d’après-midi, les deux prévenus commencent par nier farouchement être ce que la Sureté de Rouen affirme. Il aurait pu réussir à tromper le juge si celui-ci n’avait pas eu entre les mains le livret militaire d’André Clément trouvé le matin même dans la villa du boulevard des Fauvettes lors d’une fouille méthodique effectuée par la police marseillaise.

Après de nouvelles dénégations, le ravisseur ne peut que reconnaître la vérité : il est bel et bien André Clément, recherché par la justice pour détournement de fond.

Les ravisseurs du petit Claude Malmejac sont donc André Clément, né le 8 avril 1909 à Dieppe et Marie Carvin, née le 4 septembre 1867 à la Roche-sur-Yon.

III/ La première affaire de la Mairie de Dieppe

En 1925, Edmond Clément fit entrer au service des concessions des cimetières de la mairie de Dieppe sont fils âgé alors de seize ans. Celui-ci resta trois mois dans ce service avant de disparaître du jour au lendemain. Il ne fallut pas longtemps au chef de service pour s’apercevoir que le fond de roulement du service, en l’occurrence 1500 francs, avait disparu.

Le lendemain de la disparition de l’argent, le maire de Dieppe reçut un courrier de la part d’André Clément. Celui-ci expliquait sans détour avoir détourné l’argent pour « compenser me salaire que la mairie aurait du normalement [lui] verser ».

La mairie décida alors de porter plainte pour récupérer son dû mais l’affaire n’alla pas bien loin. Dès qu’il fut avisé des malversations de son fils, plaidant l’erreur de jeunesse, son père remboursa rubis sur l’ongle la somme détournée mais demanda en contrepartie que la mairie retirasse sa plainte.

Chose fut faite et le dossier classé.

IV/ L’affaire Paloumé-Lafresne

André Clément a travaillé durant six ans pour le compte de la maison de transit Paloumé-Lafresne, 44 quai Gaston Boulay à Rouen. Il habitait alors au 91 rue des Carmes en compagnie de sa mère où il louait un meublé de deux pièces à Mme Phyil.

Il avait la pleine confiance de ses employeurs qui l'avaient plus spécialement chargé de porter les chèques de la maison à la banque proche.

Le 28 novembre 1933, André Clément disparut subitement sans se faire payer son mois. En examinant la comptabilité de la société, les dirigeants découvrirent que le jeune employé s'était fait verser 125.000 francs en échange de faux chèques qu'il avait lui-même fabriqué.

L'Inspecteur Chef de la Sûreté Dorival et l'inspecteur Devaux enquêtèrent sur cette affaire et c'est en vain que la police le rechercha de partout en France, de Bordeaux à Marseille, aussi bien qu'en Belgique, à Bruxelles. Cette précision est bizarre. Pourquoi le chercher à Bruxelles et non à Londres ou à Anvers par exemple ? Pour Bordeaux, cela s'explique par le cheminement de sa mère. Quant à Marseille, la réputation de la ville a pu suffire. Mais Bruxelles ?

La Cour d'Assise de la Seine-Inférieure le jugea et le condamna à vingt ans de travaux forcés par contumace.

A Rouen, André Clément et sa mère laissèrent une bonne impression, une impression de gens très honnêtes. Le jeune homme avait été jugé comme très intelligent par ses employeurs mais trouvé son caractère très renfermé. En effet, de tous les témoignages, il ressort qu’André Clément parlait peu.

Les employés de la maison de transit, découvrant le visage des ravisseurs dans la presse parisienne trouvèrent une étrange ressemblance entre "Gilbert Rolland" et "André Clément". Ils s'en ouvrirent à leur directeur, Mr Lafresne, qui alla aussitôt voir le Procureur de la République.

Au même moment, les deux inspecteurs en charge de l'enquête de novembre 1933 virent les même photos et eut aussi trouvèrent une étrange ressemblance entre "Gilbert Rolland" et "André Clément". Leur curiosité fut encore plus en éveil quand ils constatèrent que les dates de naissance des deux suspects (Celui de Rouen et celui de Marseille) étaient les mêmes. Ils s'ouvrirent de leurs soupçons au Chef de la Sûreté de Rouen, Mr Cabannes qui recevait au même moment les mêmes soupçons de la part du Procureur de la République.

On connaît la suite.

V/ Déclaration de Mr Lafresne, directeur de la maison de transit, au Petit Marseillais :

André Clément a été à mon service durant six ans. Il avait toujours donné satisfaction et nous avions pleinement confiance en lui quand soudain il disparut à la fin du mois de novembre 1933.

Nous nous demandèrent pourquoi cet employé, intelligent mais très renfermé, avait pris cette décision inattendue de disparaître sans même demander le règlement de son mois.

Nous l'apprîmes en consultant notre comptabilité. André Clément, qui était chargé de porter les chèques à la banque, en avait falsifié deux en imitant la signature de mon fondé de pouvoir et s'état ainsi fait remettre cent vingt cinq mille francs. C'est en vain que depuis deux ans la police le recherchait aussi bien à Bordeaux qu'à Marseille ou à Bruxelles.

Je suis particulièrement heureux que, grâce à une photo de journal, nous ayons pu identifier celui qui nous vola il y a deux ans.

Je suis surtout content d'avoir pu découvrir la véritable identité de celui qui, à mon avis, a été l'instigateur de l'odieux rapt du petit Claude Malmejac.

VI/ L’affaire Nessim Samama

L'arrestation des ravisseurs du petit Claude Malmejac permis à la Sûreté de rouvrir un de ses dossiers qui allait être classé : "l'affaire Nessim Samama." Cette affaire traite le cas de l'agression d'un avocat suivi d'une tentative de chantage.

La victime est un riche tunisien installé de longue date à Marseille, Nessim Samama, avocat conseil âgé de soixante neuf ans et dont les bureaux sont installés au 31 rue Saint Basile.

Maitre Samama reçut entre le 12 et le 15 septembre 1935 la visite à son bureau d'un jeune homme à l'accent parisien prononcé. Celui-ci venait le voir à propos d'un écriteau qu'il avait vu sur une villa située au 105 promenade de la plage :

Villa à louer
S’adresser à Monsieur Samama
31 rue Saint Basile

Dans les années trente, les petites annonces pour la location était très peu répandue et les pages d'annonces classées peu développées dans les journaux. A titre d'exemple, une demi page dans le Petit Marseillais, et rien dans le Petit Provençal.

Le visiteur déclara s'appeler Isnard et habiter actuellement au Boulevard Baille. Il se déclara intéressé et demanda à la visiter, ayant l'intention de la louer pour sa mère et sa sœur demeurant à Paris et devant venir s'installer à Marseille sous peu.

Au cours de l'après-midi du même jour, monsieur Samama fit visiter la villa au jeune homme qui réserva sa réponse, attendant de connaître la réponse définitive de sa mère à qui il se proposait d'écrire le jour même.

L'avocat reçut des nouvelles de son visiteur quelques jours plus tard, en l'occurrence le 19 septembre 1935 par le biais d'un appel téléphonique d'une femme. La correspondante se présenta comme étant la mère de Mr Isnard et fixa rendez-vous à l'avocat le lendemain, à dix heures très précises, devant la villa.

VII/ L'agression de Monsieur Samama

Le 20 septembre 1935, l'avocat fut exact au rendez-vous devant les grilles de sa villa mais personne ne s'y trouvait. Troublé, l'avocat pénétra dans le jardin puis dans la villa pour attendre sa visiteuse. Il se trouvait dans le fumoir depuis quelques minutes lorsque soudain le jeune homme de la semaine précédente fit irruption dans la pièce, un revolver à la main.

" Pas un geste, pas un mot où je vous brûle !"

Terrorisé, Mr Samama s'affala dans un fauteuil proche

"Non ! Levez-vous. Marchez devant ! Ne vous retournez pas ! Montez au premier, dans le hall ! "

Monsieur Samama obéit et quand ils eurent atteint le palier du premier étage, le jeune homme expliqua : "Vous avez fait perdre à ma famille, comme avocat-conseil, plus de cent cinquante mille francs. Vous allez me signer un chèque de vingt cinq mille francs !

- Mais je n'ai pas de carnet de chèque sur moi !

- Qu'à cela ne tienne. Vous allez écrire un mot à l'adresse de votre dactylo pour qu'elle vous en fasse parvenir un tout de suite.

- Mais, je n'ai pas l'argent en banque !

- Comment, vous venez d'acheter une villa de trois cent mille francs et vous prétendez que vous n'avez pas d'argent ?"

Mais l'agresseur parut décontenancé par les réponses et l'attitude de l'avocat. Changeant finalement de tactique, il lui demanda de vider ses poches.

L'avocat s'exécuta et remit à son agresseur quatre cent cinquante francs en liquide, sa montre en or de marque suisse et d'une valeur de cinq mille francs, la giletière et la bourse en argent contenant soixante francs en monnaie. L'avocat tenta un coup de bluff :

"Je voudrais bien garder ma montre, j'y tiens beaucoup !

Elle vous sera rendue dans trois jours si dans ce laps de temps vous ne portez pas plainte".

L'agresseur fit alors monter l'avocat dans une chambre de bonne.

"Restez là où je vous tue !

- Mais vous ne m'avez pas laissé un sou !

- Voilà dix francs pour votre taxi !"

Laissant l'avocat enfermé dans la chambre de bonne, l'agresseur prit la fuite.

Au bout d'un quart d'heure, sûr que son agresseur était parti, l'avocat se libéra puis téléphona à son gendre avant d'alerter la police.

La Sûreté ouvrit alors une enquête mais ne trouva aucun Isnard à l'adresse donnée du boulevard Baille.

VIII/ Le chantage de Monsieur Samama

Le 21 septembre 1935, soit le lendemain de l'agression, Mr Samama trouva un billet dans sa boite aux lettres, billet écrit au crayon.

La montre vous sera restituée contre mille huit cent francs que vous devez me verser si vous insérez dans le Petit Marseillais l'annonce suivante :
"Perdu montre en or quartier du Prado.
Récompense 1800 francs.
Rapporter à l'adresse …"

Il faut que votre réponse paraisse avant mercredi.

On peut constater que déjà André Clément employait un procédé qui sera le sien lors de l'enlèvement.

Mr Samama inséra l'annonce sur les conseils de Mr Couplet, Chef de la Sûreté qui avait pris toutes les dispositions nécessaires pour mettre la main sur le jeun bandit.

Au rendez-vous fixé en pleine rue, un gamin s'approcha de l'avocat et lui remit la montre. Immédiatement, un policier bondit sur l'enfant et l'appréhenda. Celui-ci se défendit avec toute la conviction de la bonne foi :

"C'est un monsieur qui m'a remis cette montre, place Alexandre Labadie, et qui m'a dit de me trouver ici !"

En réalité, André Clément flairant le piège, suivit le gamin de loin et prit la fuite en voyant la police intervenir.

IX/ Les aveux de André Clément concernant l’affaire Samama

Lorsque l'agresseur passa aux aveux de l'enlèvement du petit Claude Malmejac, il avoua aussi cette agression après un long interrogatoire du juge d'instruction Mimard. Toutefois, il précisa plusieurs fois que sa mère n'était pas du tout impliquée dans cette affaire.

A la question du juge faisant remarquer qu'une femme avait téléphoné à l'avocat, il se contenta de dire qu'il avait imité une voix de femme en téléphonant !

X/ Le courroux de la presse et de la population

La presse dans son ensemble, qu’elle soit locale ou nationale, de droite comme de gauche, crie au scandale et réclame une révision urgente du code pénal. En effet, cet enlèvement a bouleversé le pays au plus haut point et la population, la « vox populi » veut que ces criminels qui se sont attaqués à un jeune enfant soient sévèrement punis.

Hors, l’article 345 du code pénal concernant « les coupables d’enlèvement, de recel ou de suppression d’enfant », ne prévoit que des peines de réclusion ne pouvant excéder dix ans. Si les circonstances atténuantes peuvent être avancées, cette peine est ramenée à cinq ans.

La population ne comprend pas que pour d’autres crimes jugés par elle moins grave, les travaux forcés (au bagne de Cayenne) soient la peine et que pour un crime d’enfant seulement la prison ne punisse le coupable. D’autant plus que la concomitance des événements permet ce type de parallèle puisqu’un faux monnayeur coupable d’avoir contrefait des pièces de dix francs a été condamné le 30 novembre 1935 aux travaux forcés à perpétuité.

XI/ Conclusion provisoire

Cette affaire toucha au plus profond de ses fibres la vieille cité phocéenne. Non seulement on avait touché à l’un de ses enfants mais en plus c’était pour une raison sordide : l’argent. Et cela était totalement inadmissible pour une population ou l’enfant est le centre de tout.

C’est pour cette raison que la ville entière se mobilisa pour retrouver Claude Malmejac et que l’on vit une association improbable pour le retrouver : la police et le grand banditisme réunis dans la recherche de la vérité !

Nous verrons la semaine prochaine, dans les conclusions définitives, toutes les conséquences de cette affaire à la fois sur notre justice et sur l’opinion publique ainsi que le procès qui se déroula moins d’un an après.
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La suite et fin de cette histoire la semaine prochaine
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dimanche 28 août 2011

L’info du dimanche : Casse-tête budgétaire en vue …

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Dimanche 28 aout 2011 :
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La rubrique dominicale de mon blog, « l’info du dimanche », cette information locale, régionale ou nationale glanée dans la presse et qui m’a fait bondir de colère ou de joie durant la semaine.
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Nous pouvons dire sans hésiter que nous sommes désormais en campagne pour les Présidentielles. Chaque concurrent, déclaré ou non déclaré, peaufine ses arguments, ses moments forts, son thème de prédilection.

Mais l’un des thèmes de la campagne s’est invité d’une manière bruyante : la dette et son corollaire, l’équilibre budgétaire. Ce sera « le » thème de cette campagne, n’en doutons pas.
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Le journal La Croix, toujours excellent dans ses analyses et ses mises en perspective, a publié jeudi dernier un papier des plus intéressants sur ce sujet brulant.
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Bonne lecture !
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Le casse-tête budgétaire rebat les cartes de la présidentielle
La Croix – 25 aout 2011

La crise de la dette en Europe va imposer un objectif de réduction des déficits à tous les candidats à l’élection présidentielle.
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Nicolas Sarkozy, dont le gouvernement vient d’annoncer un plan d’économie de 11 milliards d’euros pour 2012, espère tirer parti de sa posture de président « responsable ».
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La campagne pour la primaire socialiste, qui s’ouvre vendredi 26 août à l’occasion de l’université d’été du PS à La Rochelle, se fera largement sur les questions économiques et financières.
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Nicolas Sarkozy se pose en président « responsable »
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Quoi que l’on pense des réponses avancées, la crise des dettes souveraines a de nouveau permis cet été au président de la République de prouver sa réactivité face à une situation de crise. Comme au début de son quinquennat avec le conflit russo-géorgien puis avec la crise financière. Nicolas Sarkozy a ainsi endossé les habits du chef d’État « responsable ». Reste à savoir quel sera l’impact électoral du nouveau plan de rigueur.
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Directeur du département opinion de l’Ifop, Jérôme Fourquet souligne que l’« électorat de droite, comme celui du centre, est très préoccupé par la dégradation des comptes publics et la question de la dette ». Or, tout dépendra de la manière dont le message envoyé sera interprété par ces électorats. « Il est encore trop tôt pour savoir s’il estimera ou non que l’effort est suffisamment dosé, réparti et cohérent », poursuit le sondeur.
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En tout cas, l’Élysée et l’UMP ont réorienté leur angle d’attaque contre le PS : il ne s’agit plus de dénoncer un projet socialiste « archaïque » mais d’attaquer une gauche « irresponsable » en raison de son refus d’introduire dans la Constitution la « règle d’or » budgétaire.
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La mise à contribution des très hauts revenus apparaît en outre, ne serait-ce que symboliquement, comme un signal positif vis-à-vis de l’électorat populaire qui avait voté en faveur de Nicolas Sarkozy en 2007. Sans constituer un handicap électoral, étant donné le nombre peu élevé de foyers concernés. « Ce ne sont pas les gens qui payent l’ISF qui ont fait son élection », résume Jérôme Fourquet. Même si, devant une remise en cause progressive de ce qui constituait les fondamentaux du quinquennat (« bouclier fiscal », défiscalisation des heures supplémentaires), l’électorat de droite risque de se trouver un peu déboussolé.
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La rigueur budgétaire handicape les socialistes
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En 1936 comme en 1981, le contexte de crise économique avait favorisé la conquête du pouvoir par la gauche. La situation est bien différente aujourd’hui car l’ampleur de la dette publique pose au PS un problème inédit, reconnaît Alain Bergounioux, historien et membre du bureau national du PS. « Il faut à la fois réduire le déficit budgétaire, ménager des possibilités de croissance et répondre à l’exigence de justice sociale. »
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Le projet socialiste adopté à l’unanimité en mai dernier était articulé sur cette délicate équation. Mais la tourmente financière de l’été a permis paradoxalement à Nicolas Sarkozy de rebondir et de prendre à contre-pied le PS en proposant plusieurs mesures que la gauche réclamait depuis plusieurs années : taxation des transactions financières, contribution exceptionnelle des hauts revenus ou remise en cause de la défiscalisation des heures supplémentaires…
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Pour mettre un peu plus en difficulté les socialistes, la majorité en appelle à l’unité nationale pour inscrire la « règle d’or » dans la Constitution. C’est donc sur la défensive que les candidats à la primaire abordent cette rentrée, contraints à un difficile équilibre entre critique de la politique d’austérité « injuste » du gouvernement et démonstration du sérieux économique de leurs propositions.
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« Les candidats socialistes ne doivent pas se laisser enfermer dans le piège d’une course à la rigueur, prévient Alain Bergounioux, ils doivent mettre en avant leurs priorités pour un retour de la croissance. »
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Une thématique peu porteuse pour Marine Le Pen
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Les questions économiques en général ne constituent pas le point fort de la présidente du FN, qui n’a d’ailleurs finalement toujours pas présenté sa « révolution fiscale ». Une campagne présidentielle axée autour de la thématique de la dette et du déficit publics ne serait donc pas porteuse pour celle qui commence déjà à marquer le pas dans les derniers sondages d’intentions de vote.
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Même si, soucieuse d’apparaître comme une opposante crédible, Marine Le Pen a interrompu ses vacances pour tenir, le 11 août, une conférence de presse exceptionnelle sur la crise.
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La présentation du nouveau plan de rigueur lui a toutefois permis de s’adresser à sa nouvelle cible électorale – les « classes moyennes déclassées (fonctionnaires ou diplômés précarisés) », selon l’expression du politologue Gaël Brustier – en dénonçant une « nouvelle charge contre les classes moyennes » et en fustigeant « la hausse des prix de certains produits de grande consommation ».
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François Bayrou à l’aise sur ce terrain
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Le président du MoDem a-t-il le tort d’avoir eu raison le premier ? Dès la campagne présidentielle de 2007, François Bayrou avait en effet placé au cœur de sa campagne présidentielle la question de la dette publique, « épée de Damoclès au-dessus de la tête des Français », même s’il n’était pas le seul à défendre la « règle d’or » budgétaire, puisque cette dernière figurait également dans le projet présidentiel de Nicolas Sarkozy et le programme législatif de l’UMP. Il convient donc maintenant pour lui de conserver son avance sur cette thématique dorénavant au cœur de l’actualité.
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De fait, le président du MoDem a aussitôt dénoncé « un plan de rustines » et un « langage technico-administratif », proposant, à la place, « un grand plan cohérent et ambitieux, compréhensible par tous les Français ». Sur le fond, François Bayrou ne propose pas seulement, comme le gouvernement de droite, une « contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus », mais l’institution pérenne de deux nouvelles tranches d’impôt sur le revenu : une « tranche supplémentaire de 45 % » et une « tranche extraordinaire de 50 % pour les revenus très élevés ».
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La concurrence pour le centre ne vient cependant pas uniquement de la majorité de droite – de Nicolas Sarkozy à Jean-Louis Borloo – mais également d’une partie de la gauche qui se réclame aussi, selon les mots de François Hollande, candidat à la primaire, de la « vertu » et de la « responsabilité budgétaire ».
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L’écologie bousculée par l’économie
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Europe Écologie-Les Verts bénéficie avec Eva Joly d’une candidate plutôt bien armée pour manœuvrer sur le champ de l’économie. C’est sur le terrain financier que l’ancienne juge s’est fait connaître. Pour autant, la crise est incontestablement un coup dur pour sa campagne. « Quand l’économie est en crise, la pression écologiste diminue car les gens se disent que la priorité, c’est l’emploi, pas l’environnement. C’est une théorie sans doute archaïque mais que les écologistes ont toujours eu du mal à combattre », résume le politologue Daniel Boy. Conscients de la difficulté, les écologistes veulent croire que le défi est surmontable.
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« La crise nous oblige à parler d’autre chose que des petites plantes vertes, à hausser notre niveau d’expertise et de crédibilité. C’est en train de se faire », assure Jean-Vincent Placé, conseiller politique de Cécile Duflot. Les écologistes mettent ainsi beaucoup en avant le potentiel de création d’emplois que comporte leur plan de réorientation écologique de l’économie.
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L’autre difficulté des écologistes, c’est que « leurs programmes ont toujours beaucoup misé sur l’intervention de l’État et la dépense publique », souligne Daniel Boy. Un vrai problème dans un État impécunieux. Pour retrouver des marges de manœuvre, Eva Joly n’hésite pas à plaider ouvertement pour de robustes hausses d’impôts. Une revendication toujours risquée face à des Français inquiets pour leur pouvoir d’achat.
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LAURENT DE BOISSIEU, MATHIEU CASTAGNET et BERNARD GORCE.
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samedi 27 août 2011

Une nouvelle étoile américaine …

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Samedi 27 aout 2011 :
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Le samedi, durant l’été, je mets en ligne une vidéo, une image, une chanson, qui mérite le détour. Je vous laisse découvrir tranquillement ces pépites !
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La scène rock anglo-saxonne est en pleine mutation. De nouveaux acteurs apparaissent avec un talent que le « anciens » ou les « dinoasaures » ne reniraient pas. Et, pardoxelemnt, ce renouveau apparaît par le biais des femmes et pour certaines par la filière country.
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Kate PERRY, Lily ALLEN, Kelly PICKLER, Taylor SWIFT … Autant d’artistes qui sont en train de révolutionner la scène pop-rock.
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Alors, aujourd’hui, je vais mettre en ligne une chanson de Taylor SWIFT. Elle est blonde, jeune, américaine, venant de la country, belle à damner un saint, (autant de clichés qui pourraient être autant de handicap et pourtant …)
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Quand on pense que son clip « You belong with me » a été vu plus de cent vingt deux millions de fois ! (122.114.957 fois à 18 heures hier pour être précis !)
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Aujourd’hui, je vais mettre « Spark fly » qui n’a été vu qu’un million et demi de fois mais qui a la particularité d’être tourné sur scène et de « piquer » des images de la tournée 2011 de Taylor Swift aux Etats-Unis et au Canada.
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Je ne dirais qu’une seule chose : impressionnante la gamine !
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Bon visionnage
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Lien internet de la vidéo :
http://youtu.be/oKar-tF__ac
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vendredi 26 août 2011

Il y a cent ans : Revue de presse du 21 au 27 aout 1911

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Vendredi 26 aout 2011 :
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Une petite revue de presse centenaire et cent pour cent subjective des événements qui se sont déroulés l’été 1911 par le biais de la « bible » de la presse nationale de l’époque : « Le Petit Parisien »
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Lundi 21 aout 1911 :

Social : Au Pays de Galles, la grève qui touche les dockers, les cheminots et les mineurs prend un tour tragique à Llanelli. Des entrepôts ferroviaires sont incendiés lors de violents affrontements avec les forces de l’ordre. Or, un de ces entrepôts contenaient des munitions pour l’armée régulière. L’explosion est entendue à plusieurs kilomètres à la ronde. Le bilan est lourd : dix morts et trente deux blessés graves
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Marseille : L’ « AMERICAN PARK DÉTRUIT

« Un violent incendie s'est déclaré, ce matin, vers deux heures et demie, dans un établissement du rond-point du Prado, l' « American Park », genre « Luna Park ». Le feu trouvant un aliment facile dans de fragiles constructions, se propagea rapidement, détruisant le palais des soupirs, le « théâtre Tanagra n et deux autres attractions. Les dégâts sont très importants. L'incendie a été, croit-on, allumé par les étincelles d'un feu d'artifice tiré dans la soirée. »

Polémique : Deux gardes républicains sont révoqués après un passage devant le conseil de discipline. Le soir du 14 juillet, dans la cour de la caserne Napoléon, les deux hommes ont chanté à plein poumon « l’internationale »

Mardi 22 aout 1911 :

Algérie : De violents affrontements se déroulent dans la région de Kenchela où les goumiers africains du général Moinier se heurtent aux tribus rebelles de Zaers. Les combats sont violents et font trois morts du côté des goumiers. Les pertes des Zaers sont inconnus mais probablement élevés.

Maroc : Jules Cambon, ambassadeur de France en Allemagne, à la tête de la délégation française durant les négociations franco-allemandes sur le Maroc est rappelé à Paris pour exposer au gouvernement l’état des dites négociations. Ce qui inquiète la France, ce sont les revendications jugées excessives de l’Allemagne.

Guillotine : Après des dizaines d’années à rester entreposer entre deux usages dans un hangar de la rue de la Folie-Regnault, la « veuve » déménage pour la prison de la Santé. Ce déménagement s’imposait à la suite du changement de lieu d’exécution, désormais fixé sur le Boulevard Arago.

Mercredi 23 aout 1911 :

Joconde : La Joconde, le tableau inestimable peint par Leonard de Vinci, est volée au sein même du musée du Louvre. De surcroit, le musée est dans l’incapacité de dire quand ce vol a eu lieu. Bien entendu, cette nouvelle fait l’effet d’une bombe dans la presse aussi nationale que régionale et les journaux ne vont pas être tendres pour l’administration des musées nationaux. Ce vol permettra une prise de conscience par l’opinion publique des trésors se trouvant au sein des musées et va initier une loi sur la protection des œuvres d’arts.

Les journaux parisiens font remarquer que ce n’est pas la première fois que des œuvres sont dérobés dans l’enceinte du Louvre. Ainsi, en 1906, une statuette d’Isis dispartu mystérieusement avant de réapparaitre quelques mois plus tard sur dénonciation dans le magasin d ‘un receleur. Quelques jours plus tard, c’est une statuette phénicienne qui disparaît. Elle ne sera jamais retrouvée. Enfin, en 1908 , une curieuse effraction se déroula puisque que quelqu’un pénétra de nuit dans la galerie Apollon mais ne déroba rien. Le mystérieux intrus se contenta de déplacer plusieurs tableaux et statues.

Le 22 aout 1911, le peintre Louis Béroud se rend au Louvre pour y faire un croquis de sa prochaine toile Mona-Lisa au Louvre, mais à la place de La Joconde se trouve un grand vide3. Béroud contacte les gardiens, qui indiquent que l'œuvre doit être à l'atelier photographique. Quelques heures plus tard, Béroud s'enquiert à nouveau auprès des surveillants et on lui apprend que Mona Lisa n'est pas chez les photographes. Le tableau a bel et bien été volé le 21 aout 1911. On soupçonne le poète Guillaume Apollinaire (qui avait quelques années auparavant employé comme secrétaire et factotum Géry Pieret qui avait lui-même dérobé des statuettes et des masques phéniciens au Louvre) et le peintre Pablo Picasso d'être les auteurs de ce vol, revendiqué par ailleurs par l'écrivain italien Gabriele D’Annunzio. La Société des amis du Louvre offre une récompense de vingt-cinq mille francs, par ailleurs un anonyme propose de doubler cette somme. La revue L’Illustration promet cinquante mille francs pour qui rapporterait le tableau dans les locaux du journal.

Le voleur était l’italien Vincenzo Perrugia, un vitrier qui avait participé aux travaux de mise sous verre des tableaux les plus importants du musée. Il conserve le tableau pendant deux ans dans sa chambre à Paris, il était caché dans une valise, sous son lit. De retour en Italie, il propose de le revendre le 10 décembre 1913 à un antiquaire florentin, Geri, qui avait passé une petite annonce pour acheter des œuvres d'art et qui donne l'alerte

Jeudi 24 aout 1911 :

Catastrophe maritime : Inauguration du monument concernant les marins du « Pluviose », ce sous marin tragiquement disparu le 27 mai 1910 dans la rade de Calais, emportant dans son naufrage trois officiers et vingt quatre marins.

Diplomatie : Arrivé à Paris du Roi de Grèce, George 1er pour un voyage incognito d’une semaine. Il est prévu qu’il gagne ensuite officiellement Copenhague pour une visite officielle avant de revenir à Paris pour rencontrer cette fois-ci officiellement le Président Fallières.

Joconde : Conséquence directe du vol du tableau, le musée du Louvre est fermé trois jours pour permettre à la fois à l’enquête de se dérouler et aux services de sécurité du musée de revoir leurs procédures.

Vendredi 25 aout 1911 :

Portugal : Manuel De Ariaga est élu président de la République du Portugal par l’assemblée constituante. C’est le premier président portuguais

Quand il fut élu président, il tenta en de réunifier le parti républicain qui s'était divisé en plusieurs factions, sans succès, notamment parce que son mandat était menacé par la révolte monarchique du capitaine Paiva Couceiro. Il fut remplacé comme président par le professeur Teofilo Braga en 1915 et décéda à Lisbonne deux ans plus tard.

Manuel de Arriaga fut président durant la participation portugaise à la Première Guerre mondiale. Il fut incapable de gérer à la fois la réunification de son parti, la guerre et les problèmes économiques du pays. Le parlement fut fermé et Manuel de Arriaga fut accusé de corruption.

Joconde : Les journaux parisiens pensent tenir une piste avec des témoignages de voyageurs et de cheminots qui affirment avoir vu, sur les quais de la gare d’Orsay, un homme suspect avec un tableau, embarquer dans un train à destination de Bordeaux.

Ce sera une fausse piste puisque désormais on sait que le tableau n’a jamais quitté la capitale mais cette fausse piste détournera la police plusieurs jours de ses recherches.

Apaches : Un journaliste, P-L Pigneret, est passé à tabac par des Apaches à Ménilmontant mais réussi à se sortir de ce guêpier en faisant usage de son revolver. Officiellement, les apaches en voulaient à son argent. La police enquête.

Marseille : Une bombe fait explosion dans une maison de Marseille

Une formidable explosion mettait en émoi, ce matin vers trois heures, les habitants du quartier des Catalans une bombe venait d'éclater dans une maison neuve de cinq étages. Promenade de la Corniche, au 133.

Cette maison a pour constructeur et propriétaire, M. de Benedetty, entrepreneur, qui habitait l'entresol avec sa femme, deux enfants, une bonne et sa belle-mère. Les autres étages n'étaient pas encore occupés.

L'explosion a détruit l'escalier intérieur, endommagé le plancher de l'entresol et brisé toutes les vitres de la maison. Il n'a causé aucun accident de personne.

L'engin avait été placé dans le corridor d'entrée On recherche les auteurs de cette lâche vengeance.

Samedi 26 aout 1911 :

Portugal : La France, dans un « acte de courtoisie à la suite de l’élection de son premier président », reconnaît la République du Portugal.

Maroc : Départ de Paris de l’ambassadeur de France en Allemagne, Jules Cambon, avec de nouvelles propositions françaises concernant les négociations Franco-allemande sur le Maroc. De sources non autorisés, la presse confirme les vues de l’Allemagne sur le nord du Congo et le Tchad, vues que la France ne peut accepter.

Apaches : Une jeune fille de quinze ans est violée par une bande d’Apaches dans les fossés du Fort de Vincennes. Les indiscrétions de l’un d’entre eux permis à la police d’arrêter la bande dès le lendemain. Treize apaches, tous ayant participés au viol, sont mis sous les verrous. De sources policières, ils n’en seraient pas à leur premier viol.

Dimanche 27 aout 1911 :

Faits divers : Le ministres des armées inflige des sanctions disciplinaires au mieux, des renvois devant la justice au pire, à onze officiers et un sous officier du 8ème Dragons basés à Lunéville (deux officiers généraux, cinq officiers supérieurs, quatre officiers subalternes) pour soit avoir trempé dans le détournement de plusieurs centaines de milliers de francs du Mess des Sous-officiers de ce régiment, soit par négligence d’avoir laissé faire.

Maritime : En deux jours, la Royal Navy anglaise puis la marine française arraisonnent dans la Manche trois navires transportant des armes de contrebande. Ces arraisonnements font aussi suite à la saisie à Barrow de deux autres vapeurs, l’Arizona et le Foam Queen, armés eux pour la guerre. Les deux amirautés se refusent à tout commentaire. Le gouvernement anglais de son côté parle de navires à destination de l’Amérique du Sud ou Centrale mais les négociants de la City et deux armateurs français avancent eux l’hypothèse d’un trafic d’armes en direction des monarchistes portugais qui prépareraient un coup d’état contre la jeune république.

Chasse : Ouverture officielle de la chasse en France.
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lundi 22 août 2011

1935 : L’affaire MALMEJAC – Partie 7 – Devant la Justice …

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Lundi 22 aout 2011 :
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Tous les lundis, durant cet été 2011, je vais explorer les méandres d’une affaire qui a bouleversé une longue semaine la ville de Marseille, et au-delà, la France entière : « l’affaire MALMEJAC » ou l’enlèvement d’un enfant en plein jour et au cœur même de la cité phocéenne.
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Ordre des publications :

Lundi 4 juillet 2011 : Présentation
Lundi 11 juillet 2011 : L’Enlèvement
Lundi 18 juillet 2011 : Premières recherches
Lundi 25 juillet 2011 : La piste d’Endoumes
Lundi 1er aout 2011 : La piste de Saint-Just
Lundi 8 aout 2011 : Les médias s’en mêlent
Lundi 15 aout 2011 : Le Boulevard des Fauvettes
Lundi 22 aout 2011 : Devant la justice
Lundi 29 aout 2011 : Un dernier rebondissement
Lundi 5 septembre 2011 : Conclusion

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I / M. Couplet sur les lieux :

L’appel de l’inspecteur Aubin à peine reçu, le Chef de la Sûreté bondit dans une voiture pour se rendre le plus rapidement possible au boulevard des Fauvettes. Il est accompagné de l’inspecteur chef Martini, de l’inspecteur Desmoulins et du secrétaire Musy.

Dans le sillage de la voiture de police s’engage une noria d’autres véhicules. Les journalistes qui attendent devant l’Evêché ont compris que quelque chose d’important est en train de se passer.

Lorsque l’étrange caravane arrive à Beaumont, une foule compacte est massée devant la villa des ravisseurs, foule franchement curieuse et tendue. En effet, les nombreux enfants qui sortaient de l’école voisine lors de l’intervention des inspecteurs Aubin et Le Boazec, ont compris que des événements intéressant étaient en train de se produire dans leur quartier habituellement si calme. En courant, ils avaient gagné le portail de la villa et, bientôt, voisins, voisines, mères venant chercher leurs enfants, curieux, s’étaient rassemblés sur le trottoir, devant la porte du jardin au fond duquel s’élève la villa des ravisseurs.

L’arrivée, que l’on ne peut pas qualifier de discrète, du chef de la Sécurité Couplet, leva les derniers soupçons qui pouvaient encore étreindre la foule. L’affaire était sérieuse et la seule affaire sérieuse en cours à ce moment là dans Marseille était l’affaire Malmejac. La ravisseuse se trouvait donc derrière ces murs. De curieuse, la foule bascula dans l’hostilité la plus complète.

A peine les policiers furent-ils dans la maison que les inspecteurs Aubin et Le Boazec qui attendait impatiemment l’arrivée de leur chef, lancèrent d’une voix chargée d’émotion :

« Voilà l’homme et la femme mais surtout voilà Claude ! »

Comme l’expliquera plus tard M. Couplet, il fut pris d’une énorme émotion en voyant le petit garçon que portait l’un de ses inspecteurs. Il ne faisait aucun doute que l’enfant était Claude Malmejac. Le furoncle sanguinolent plus que les vêtements le faisait comprendre. A la pensée de la future joie des parents, l’émotion du chef de la Sureté fut encore plus grande.

C’est à ce moment là que Gilbert Rolland interpella M. Couplet qu’il venait de reconnaître :

« Qu’allez-vous faire de moi ? Vos inspecteurs m’ont donné la promesse formelle de me laisser échapper ! »

M. Couplet se contenta de répondre d’un ton sec :

« On va seulement vous interroger ! »

Il ne voulait pas heurter un témoin qui, pour l’instant, n’avait pas dit grand chose. Il ne fallait pas qu’il se referme sur lui-même comme une huitre et ne parle plus.

II / Perquisition aux Fauvettes :

Prenant les choses en mains, M. Couplet distribua des consignes claires : Priorité à l’enquête. Dans un premier temps, les inspecteurs procédèrent aux constatations indispensables à la bonne marche de l’enquête, fouillant sommairement la villa.

Ils commencèrent par inspecter le rez-de-chaussée. Le salon était modeste, assez simple d’aspect, bien que meublé sans aucun gout. Une table et des chaises en osier en sont le principal mobilier. Sur la droite, à côté d’une cheminée postiche, une armoire peinte en blanc est dressée. De l’autre côté, sur un meuble grossier, trône un poste T.S.F. flambant neuf.

Sur la table sont posés en vrac des journaux racontant le rapt, un roman de Gyp, « Ces bons docteurs », des revues policières et artistiques.

Par une sorte d’alcôve, un petit escalier permet de gagner le premier étage. Toujours au rez-de-chaussée, la cuisine est située quant à elle à côté du salon.

Cette cuisine n’est pas comme les autres. Les policiers ont l’impression de pénétrer dans un zoo. En effet, ils ont la surprise d’y découvrir successivement un chien se terrant dans un coin, une perruche sur son perchoir et un singe, enfermé dans une cage grossière. C’est une véritable ménagerie qui peuple la cuisine. Du travail attend la S.P.A.

Au premier étage, deux chambres prennent jour le devant de la villa. Celle de gauche est celle de Gilbert Rolland. Un divan, des étagères avec des livres, romans d’aventure, mais aussi des romans policiers qui côtoient les textes des grands auteurs classiques.

A gauche, on découvre la chambre de Marie Rolland. Les murs sont tapissés d’un papier peint clair. Le lit fait face à une cheminée ornée de candélabres richement décorés. A côté du lit, un petit divan est installé avec quelques coussins posés dessus. Dans un coin, les policiers trouvent une grande malle contenant divers documents comme des lettres, des papiers, des factures, etc.

Dans le cabinet de travail qui est situé sur le même palier, à proximité d’une salle de bain, les enquêteurs vont découvrir un chevalet et des aquarelles signées de la main de Gilbert Rolland. Les policiers ne peuvent que constater que, comme peintre, le jeune homme possède un talent certain.

III / Transfert à l’Evêché :

Une fois la perquisition sommaire effectuée, M. Couplet décide alors de transférer les suspects à l’Evêché pour, dans un premier temps les interroger puis, dans un second temps, les inculper.

Lorsqu’ils comprennent qu’ils vont être emmenés au siège de la Sureté, Marie et Gilbert Rolland sont soudain pris d’inquiétude pour le sort de leur ménagerie.

« Soyez bon pour eux ! » supplient ils « Soignez les biens. Au besoin, prenez-les chez vous. Mais, qu’au moins ils ne manquent de rien ! »

A l’extérieur, les policiers ont eu la sagesse d’amener devant la villa une de leurs voitures et d’établir un périmètre de sécurité autour de la villa. C’était là une bonne précaution. La foule était en effet prête à faire un mauvais sort à la mère et à son fils. Le lynchage pur et simple n’était pas loin. Les cris, les invectives et les huées ne laissent planer aucun doute de l’état d’esprit de la foule.

Avec difficulté, sous la protection des brigadiers présents, le couple est placé dans la voiture qui démarre aussitôt en direction de l’Evêché. Elle est suivie de très près par deux autres véhicules de police, le premier avec les inspecteurs Le Boazec et Aubin, l’autre avec M. Couplet qu’accompagne le petit Claude.

IV / Les retrouvailles :

Le bruit de la découverte de l’enfant, bien vivant et en bonne santé, n’ayant subi aucun sévices, s’était répandu comme une trainée de poudre autour de l’Evêché.

Lorsque les trois voitures, trainant toujours dans leurs sillages une noria de véhicules de presse, arrivèrent aux abords de l’hôtel de police, la rue de l’Evêché était noire de monde. Après le passage difficile des voitures, les policiers durent fermer les portes pour éviter que l’hôtel de police ne soit envahi par tous ceux qui voulaient voir l’enfant et faire un mauvais sort aux coupables.

Alors que les suspects sont transférés sans ménagement dans le bureau du chef de la Sureté, l’enfant, pleurant dans les bras de l’inspecteur-chef Martini, est conduit dans l’appartement de fonction de M. Couplet où l’accueille une Mme Couplet pleine d’attention. Le but de cette opération est d’éviter au bébé d’être traumatisé par la foule et permettre aux parents de venir le récupérer en toute sérénité.

Calmé, l’enfant promène un regard étonné sur toute cette animation, comprenant confusément que quelque chose d’heureux pour lui est en train de se dérouler autour de lui.

Pendant ce temps là, au 185 de l’Avenue du Prado, on ignore encore la bonne nouvelle. C’est une voisine, Mme Mallet, qui avait mis son téléphone au service de la famille, qui reçut l’appel de M. Couplet. Comprenant que quelque chose de sérieux se déroulait et en l’absence de M. Malmejac, c’est le cousin de celui-ci, M. Sarlande qui prit l’appel. En effet, le docteur Malmejac ne se trouvait pas présent à ce moment là, se trouvant dans les locaux du Petit Marseillais en compagnie du rédacteur en chef de celui-ci, Léon Bancal.

Après que M. Sarlande eut affirmé qu'il était seul et que personne ne les écoutait, M. Couplet laissa éclater sa joie. Dans un premier réflexe, le cousin crut à une odieuse plaisanterie. Son esprit ne pouvait concevoir une telle chose, ne pouvait concevoir un tel bonheur. Il fallut que M. Couplet fasse entendre la voix du petit Claude pour que son interlocuteur comprenne enfin la vérité.

N’arrivant toujours pas à croire une telle nouvelle et ne voulant pas donner de faux espoirs à sa cousine, M. Sarlande se contenta de dire à la famille, sur un ton détaché :

« Encore une nouvelle piste. Je vais aller la vérifier ! »

Il quitta le domicile des Malmejac en compagnie de Mme Mallet, la voisine et Mme Armand, l’amie de la famille pour se rendre à l’Evêché. Il voulait vérifier de visu l’état de santé du petit Claude pour éventuellement préparer la mère à affronter le pire. M. Sarlande n’arrive pas à imaginer que l’enfant soit en bonne santé après une disparition d’une semaine

De son côté, le docteur Malmejac se trouve dans les locaux du « Petit marseillais » où il a rendez-vous avec le rédacteur en chef de celui-ci. Léon Bancal. Il compte remettre à Léon Bancal le message qu’il a écrit le matin même et qu’il compte faire publier le lendemain dans la presse locale.

Le journaliste, lorsqu’il est prévenu par un de ses collaborateurs que l’enfant a été retrouvé, quelques instants avant de rencontrer le père éploré, pense dans un premier temps qu’il s’agisse d’une fausse nouvelle. Mais le journaliste qui a contacté la rédaction est un de ses meilleurs éléments. Il faut quelques secondes à Léon Bancal pour prendre toute la mesure de l ‘événement. Il décide alors de prévenir le docteur Malmejac avec douceur.

Léon Bancal se contenta seulement d’aviser son interlocuteur que la police avait découvert un enfant dont le signalement semblait correspondre au petit Claude. Dans les locaux de la rédaction du « Petit- marseillais », on savait désormais qu’il ne pouvait y avoir aucune erreur possible. Toutefois, aucun journaliste ne voulait prendre le risque de l’annoncer au principal concerné, ne sachant top « comment présenter la chose », ne voulant pas « éprouver une joie trop directe » comme l’expliquera plus tard Léon Bancal dans un éditorial.

Ce sera durant le trajet en taxi entre les locaux de la rédaction du « Petit marseillais » et l’Evêché que Léon Bancal va annoncer au docteur Malmejac la bonne nouvelle, mettant ainsi fin à l’angoisse compréhensible du père.

Lors de son arrivé à l’Evêché, le docteur Malmejac est accueilli par la clameur de la foule qui laisse exploser sa joie en le voyant. Suivant un policier, le docteur Malmejac monte quatre à quatre les marches conduisant à l’appartement de M. Couplet.

« C’est lui ! » s’écrie-t’il en voyant l’enfant avant de se précipiter en larmes sur son fils.

L’émotion qui présida aux retrouvailles fut intense et indescriptible. Des reporters-photographes voulurent immortaliser cet instant. Ils furent alors autorisés à pénétrer dans le petit appartement de fonction. Les éclairs de magnésium illuminèrent la bousculade qui s’ensuivit.

Pendant ces minutes inoubliables, la gouvernante Georgette Perrachon se trouvait dans un bureau adjacent de la Sureté. La nouvelle de sa présence parvint aux oreilles du docteur Malmejac qui pria aussitôt qu’on aille la chercher. Le cri qu’elle poussa en voyant l’enfant fut aussi émouvant que les sanglots de son employeur. L’enfant, voyant tout cela, se mit lui aussi à pleurer.

V / Premiers interrogatoires :

Durant toutes des effusions, le couple suspect attend son interrogatoire sans le bureau du chef de la Sureté.

La vieille femme, appuyée sur sa canne, semble perdue dans ses pensées, tandis que son fils paraît prostré. Le « Petit marseillais » va faire une description peu flatteuse de la scène :

« La vieille dame en noir, assise et comme repliée sur elle-même, s’appuyant sur sa canne, fixait le sol, n’osant relever la tête. Son fils, le visage effilé, d’allure non moins misérable, avec des yeux fuyants et faisant preuve d’un cynisme révoltant, semblait préparer dans une froide méditation des raisons qui puissent atténuer la gravité de son crime. »

C’est bien entendu M.Couplet qui va mener les premiers interrogatoires dont le but est de définir l’identité des ravisseurs et cerner leurs motivations.

La vieille femme se présente sous le nom de Marie Joly épouse Rolland née à la Roche-sur-Yon le 4 septembre 1867, sans emploi. Son fils, Gilbert, est âgé de 25 ans, dessinateur de profession mais actuellement sans emploi.

Ils ne font pas trop de difficulté pour raconter ce qu’il s’est passé à l’exception du fait que mère et fils s rejettent l’idée première de l’enlèvement.

Le Petit Provençal du 3 décembre 1935 racontera en détail l’interrogatoire des prévenus, preuve flagrante des complicités existante à l’époque entre les forces de l’ordre et la presse locale. A méditer à l’heure de notre sacro-saint « secret de l’instruction » !

VI / La version de Marie Rolland :

« Nous sommes arrivés à Marseille depuis deux ans. Nous avons habités tout d’abord avenue des Roches, au Roucas-Blanc. Cinq mois après, j’ai acheté un magasin de teinturerie au Cours Devilliers. Il valait 75000 francs mais je n’ai payé que 45000 francs comptant. Après six mois d’exploitation, j’ai du le revendre et j’ai perdu beaucoup d’argent. Nous sommes allé nous installé Boulevard Bel-Air à Beaumont puis au Boulevard des Fauvettes. Nous vivions de l’argent qui me restait de la vente de la teinturerie ainsi que d’objets mis en gage au Mont de Piété sans oublier l’argent récupéré par la vente des portraits que mon fils faisait.

Finalement nos ressources s’épuisèrent. Notre loyer était de 3500 francs. Il nous reste aujourd’hui 35 francs. Il nous fallait à tout prix des ressources. J’ai vu beaucoup de films cinématographiques. J’ai lu beaucoup de romans policiers. C’est de là que me vient l’idée de voler un enfant afin d’essayer d’obtenir contre sa restitution à ses parents une forte rançon. Cette idée, j’en fis part à mon fils avec qui nous nous sommes concertés pour mettre au point les détails de son exécution.

Je me suis mis en quête d’une proie. Un jour, alors que je venais de visiter un appartement dans l’immeuble situé au 50 Boulevard Dugommier, je rencontrais une nurse qui avait avec elle deux enfants. Quoiqu’ennuyé de me trouver en présence de deux bébés, je décidais de les utiliser. C’étaient les enfants du docteur Cizali.

Le soir, je fis part de mon intention à mon fils qui me répondit de faire comme je voudrais.

Le lendemain, vers dix heures, je prenais place dans un taxi que je hélais à la station de la rue Saint Bazile, au Chapitre. Arrivée au Jardin Longchamp où je savais trouver la nurse et les deux petits confiés à sa garde. Je priais alors le chauffeur de taxi d’aller chercher la nurse au milieu d’un groupe de personne. Mais cette première tentative échoua. Quand j’arrivais chez moi, je contais les détails de ma mésaventure à mon fils qui ne montra aucune émotion. Je n’abandonnai pas mon projet. Et vous savez comment, après avoir pris tout mes renseignements, je réussissais à m’emparer du fils du docteur Malmejac.

Avec mon fils, nous convînmes que si l’affaire réussissait, nous nous retrouverions Cours Pierre Puget. Quand j’eus commis le rapt, je me fis conduire au numéro 5. Là, j’entrais dans le couloir. Quand le chauffeur fut reparti, je ressortis. Je me suis promené en long, en large, sur le cours, en attendant mon fils qui n’arrivait pas. En allant et venant, je remarquai que la porte de l’immeuble portant le numéro 18 était ouverte. Je pensais que je pourrais me débarrasser à cet endroit du landau bien encombrant. C’est ce que je fis quand mon fils arriva. Tandis que je laissais le landeau à coté de la porte de la cave, il arrivait en taxi. Nous nous sommes fait conduire devant la porte de l’école des garçons de Montolivet. De là, nous nous sommes rendus chez nous à pied.

Tandis que je me demandais ce que pouvait penser les parents du petit, mon fils m’expliqua que je n’avais pas à m’inquiéter, qu’il avait envoyé une lettre. Sur le moment, je n’ai pas compris car je ne m’expliquais pas comment il avait eu les moyens de se rendre au domicile des parents. Le lendemain et les jours suivants, nous avons acheté une grande quantité de journaux mais je n’ai pas osé faire marcher le poste TSF, du moins au début.

Mon fils a écrit de nombreuses lettres. Dans une de ces lettres, celle expédié hier au soir, il a mis, ainsi que le demandait le Docteur Malmejac, le bracelet du petit Claude.

J’ai toujours bien traité l’enfant, me conformant aux prescriptions données par la mère à la TSF quand nous avons décidé de l’écouter. Je lui ai surtout fait manger des bananes. Je vous jure qu’il n’y a aucun complice à rechercher. »

VII / La version de Gilbert Rolland :

« Je suis dessinateur-artistique, élève de l’école des Beaux-arts de Marseille. J’étais sans travail depuis longtemps. Acculé à la misère, l’idée m’est venue de ravir un enfant et de faire chanter la famille. Je me suis mis en campagne sans connaître précisément le nom de mon éventuelle victime. Après un essai infructueux, j’ai remarqué l’apparence cossue de l’immeuble situé au 185 de l’avenue du Prado, le jour où, précisément, en sortait un enfant et sa nurse. Je n’ai su qu’après l’enlèvement qu’il s’agissait de Claude Malmejac, fils de docteur.

A des signes extérieurs, j’ai pensé que la famille devait avoir de l’argent. J’ai alors dis à ma mère ce qu’elle avait à faire. Tout était arrêté et murement préparé. Vous connaissez lesz circonstances du rapt. Ma mère a pris un taxi qui l’a d’abord conduite chez le docteur Crémieux où elle a pu se libérer de la nurse, puis elle a donné comme adresse le 5 Cours Pierre Puget. Quand le taxi est parti, elle a traversé le cours pour se débarrasser du landau dans le couloir du n.18. Moi, j’attendais un peu plus loin.

Nous avons alors pris un second taxi de couleur noire appartenant à un particulier que je ne connais pas et nous sommes fait conduire avec l’enfant à Montolivet. De Montolivet, nous avons alors gagné à pied notre villa sans éveiller l’attention de personne.

Nous avons bien traité l’enfant. C’est ma mère qui faisait sa petite soupe. Moi, je lui ai donné des bananes pour calmer ses pleurs.

En arrivant chez nous, j’ai écrit au père pour lui demander 50000 francs. »

Cette affirmation fait bondir les policiers qui lui font immédiatement remarquer que suivant ses premières déclarations, il était sensé ne pas connaître le nom de l’enfant.

« Vous avez raison, j’avais eu le temps de me renseigner. J’ai d’ailleurs écrit plusieurs lettres et j’étais prêt à lui faire parvenir la chainette de l’enfant pour entrer en possession de l’argent quand s’est produit le coup de théâtre de notre arrestation. »

Les policiers vont alors pousser l’interrogatoire pour comprendre quel degré de connaissance il avait de l’identité de l’enfant enlevé. Et là, les policiers gagnent le Jackpot.

« Si ma mère m’a attendu au Cours Pierre Puget, c’est que je suis allé porter une lettre au domicile du Docteur Malmejac. J’ai glissé cette lettre sous la porte de l’immeuble. Je suis ensuite allé à la Poste Castellane pour y envoyer une seconde lettre au contenu strictement identique. J’ai choisi des fils de docteurs parce que je considère que les médecins sont habituellement dans l’aisance. »

Les conditions de détentions de l’enfant intéressent aussi les policiers.

« Le soir du rapt, nous avons donné une soupe au petit qui l’a mangé avec quelques difficultés. Nous l’avons couché sur le divan. Ma mère lui a mis une de mes chemises de nuit. Je suivais le développement de l’affaire avec anxiété par le biais des journaux. La première nuit, le petit a bien dormi. Quand j’ai vu l’importance que prenait le rapt, j’ai eu peur mais il était trop tard pour changer d’avis. »

Les policiers veulent alors savoir si les nombreux messages radiophoniques n’ont pas émus les ravisseurs :

« J’ai précisément un poste TSF à la maison. Je n’ai entendu que le dernier appel de la famille. Je lisais plutôt les journaux, avec beaucoup d’attention. Je dois ajouter que nous étions fort ennuyés de la tournure que prenais l’affaire. Le gosse nous embarrassait et nous ne savions pas comment le rendre sans attirer l’attention de la police. »

Les policiers s’intéressent enfin à la tentative de tuer l’enfant lors de l’interpellation. Gilbert Rolland se défend avec force de cette interprétation des événements

« Ca n’a été que de la mise en scène. Je n’ai jamais eu l’intention de tuer l’enfant. Le second revolver, je ne l’ai jamais eu en main. Quant au premier, celui que j’ai remis aux enquêteurs, la gâchette était au repos. C’est vous dire que je n’avais aucune intention criminelle. Les inspecteurs m’ayant donné leur parole que rien ne serait fait contre nous, j’ai immédiatement ouvert la porte et on nous a arrêtés aussitôt. »

Et Gilbert Rolland va tenter d’amadouer les inspecteurs en se faisant passer à son tour pour une victime :
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« Je suis un malheureux, c’est la misère seule qui m’a poussé. Je suis un chômeur, pas un bandit ! »
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On appréciera à sa juste valeur cette dernière affirmation !
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VIII / Au Palais de Justice
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Aussitôt les interrogatoires terminés, les deux prévenus sont transférés sous bonne escorte au Palais de Justice pour y être présenté au juge d’instruction, Mr Minnard. Il est donc plus de vingt trois heures quand commence une confrontation des plus capitales.
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Après avoir lu les déclarations que les prévenus ont fait devant les inspecteurs de la Sureté, le juge leur demande s’ils ont bien compris la gravité des faits qui leur sont reprochés et s’ils veulent un avocat pour les défendre. Marie Rolland et gilbert Rolland vont répondre tout deux par la négative à cette question cruciale.
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Le juge va donc inculper Marie Rolland de Rapt et va la faire incarcérer en préventives à la prison pour femmes de Présentines et Gilbert Rolland de complicité de rapt, de tentatives d’extorsion de fonds et d’agression à domicile aggravée à mains armées, le jeune homme ayant avoué aussi l’agression à domicile contre Mr Sciamanna.
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L’affaire aurait pu s’arrêter là sans les rebondissements du lendemain matin
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La suite la semaine prochaine ...
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