lundi 23 août 2010

CTGQOYCP : Affaires Steinheil, scandales oubliés de la IIIème république

.
Lundi 23 aout 2010 :
.
Le lundi, comme prévu, un événement « C’est tellement gros qu’on y croit pas ». Et pourtant, tout dans l’histoire racontée est véridique.
.
Aujourd‘hui, penchons-nous sur une vielle histoire : la mort à l’Elysée du Président Félix Faure et tout ce qui en découla.
.
Le 16 février 1899 en sortant d’un conseil des ministres houleux consacré à l’affaire Dreyfus, Félix Faure reçoit deux visiteurs, le Cardinal Richard puis le Prince Albert 1er de Monaco, tout deux venus intercéder en faveur du capitaine. Tout deux préciseront plus tard que le président avait l’air absent, comme absorbé par autre chose, désireux d’abréger l’entrevue.
.
Et ils ont raison car le président ne pense qu’à la jolie jeune femme de 28 ans qui l’attend dans le petit salon bleu de l’Elysée. Avant de la rejoindre, le Président, comme il en a pris l’habitude, se fait servir aphrodisiaque et part rejoindre sa maitresse, Marguerite Steinheil.
.
Quelques minutes plus tard, le chef de cabinet Le Gall qui, comme à l’accoutumé, est présent dans la pièce d’a coté, est alerté par des cris. Se précipitant,, il découvre le Président de la République avec pour seul vêtement son gilet de flanelle, étendu sur le canapé, dans le coma, la main crispée dans les cheveux de sa maitresse, entièrement nue.
.
Ne perdant pas son sang froid, Le Gall fait immédiatement évacuer Marguerite Steinheil par un valet de confiance avant d’appeler le médecin. Le femme du Président, qui loge à l’Elysée, immédiatement prévenue du drame, fait quérir de son côté le curé de la Madeleine pour administrer les derniers sacrements.
.
Qui est donc Marguerite Steinheil qui a fait chavirer au sens propre du terme le Président de la république ?
.
C’est la fille d’un riche industriel de la région de Belfort, Edouard Japy. Elle minaude car elle a compris que cela plait mais elle a du caractère et surtout beaucoup d’ambition. A 19 ans, elle épouse un peintre parisien, presque quadragénaire, qui restaure des vitraux. Pas très riche, ce parti là lui permet de gagner la capitale et de se faire un nom. C’est ce qu’elle fait en ouvrant un salon littéraire où se pressent du beau monde comme Zola, Coppée, Loti, Bartholdi, Massenet, Gounod, Bonnat mais aussi des industriels, des magistrats, des politiques.
.
Elle ne tarde pas à collectionner les amants, discrets et généreux qui passent commande au mari de peinture après que celui-ci ait abandonné la restauration des vitraux. Son dernier amant en date, juge d’instruction mais aussi commandant de réserve, doit partir en manœuvre en Maurienne. Il se fait donc accompagner par … le couple Steinheil ! C’est là que Félix Faure rencontre Marguerite et tombe immédiatement sous son charme. En guise de dédommagement, le juge recevra la légion d’honneur et le mari la commande d’un important tableau qui doit décorer l’Elysée !
.
La rumeur court très vite. Dès l’annonce du décès, les parisiens savent que leur Président est mort dans les bras d’une femme. Même si Marguerite Steinheil va éviter de se montrer aux obsèques du président, les rumeurs courent. Interrompu un instant par la tentative de putsch de Paul Déroulède qui, lors des obsèques nationales, va tenter de faire marcher les soldats de la garnison de Paris sur l’Elysée pour renverser le très dreyfusard président Loubet qui a donc succédé à Félix Faure.
.
Marguerite Steinheil va se faire oublier, se consolant dans les bras de Chounanard, le président des Forges de Vulcain, puis de Borderel, un riche veuf, jusqu’à ce fatidique dimanche de Pentecôte, le 6 mai 1908, où elle va de nouveau se retrouver sous les feux de l’actualité.
.
Ce matin à, Remy Couillard, valet chez les Steinheil, trouve, dans sa chambre sa patronne ligotée sur son lit, son patron, dans la salle de bain, étranglé par une cordelette, et dans la chambre d’ami, la mère de sa patronne, bâillonnée et étouffée.
.
Aux enquêteurs, Marguerite Stenheil révélera que vers minuit, trois hommes barbus, accompagnés d’une femme rousse, l’ont agressé, cherchant l’argent et les bijoux. Comme elle était trop longue à répondre, elle a été battue et a perdu connaissance. A sa connaissance, rien n’a été volé hormis trois de ses bijoux. Chose qui immédiatement intrigue les enquêteurs puisque d’autres bijoux se trouvaient bien en évidence. De plus, aucun signe d’effraction n’est relevé, aucune trace sur les poignets et chevilles de Marguerite Steinheil alors qu’elle dit être resté six heures ligotée.
.
Malgré ces incohérences, Marguerite Steinheil n’est pas inquiété et le juge d’instruction conclut au cambriolage et aux crimes crapuleux, ne voulant sans doute pas trop enquêter sur cette femme au passé sulfureux.
.
A la suite d’un reportage paru dans le Figaro faisant remarquer que le juge d’instruction est un ancien amant de la victime et que le couple Steinheil était criblé de dette, l’enquête est rouverte avec un autre juge d’instruction. Devant les fausses déclarations de Marguerite Steinheil, après la saisie des bijoux soit disant volé qu’elle avait mis en vente chez un usurier, la jeune femme est arrêtée et inculpé du meurtre de sa mère et de son mari.
.
Le 3 novembre 1909 s’ouvre le procès de « la veuve rouge », « la Bovary de Montparnasse », « la Sarah Bernhardt des assises », « la veuve tragique » … Brouillant les pistes, jouant de tous les ressorts de la dramaturgie, répondant avec humour aux questions, la jeune femme réussit à renverser la tendance et est acquitté le 13 novembre 1909.
.
Après cela, elle quitte la France, gagne l’Angleterre, se mariât avec un richissime Lord Anglais et meurt en 1954 en emportant son secret dans la tombe.
.
L’histoire aurait pu s’arrêter là sauf qu’une étrange rumeur parcourt Paris qui se voit publier par la Libre Parole, journal antisémite de l’époque dreyfusarde : Marguerite Steinheil aurait été l’instrument des dreyfusards et aurait assassiné le Président, hostile à la révision du Procès Dreyfus, pour permettre à Emile Loubet, pro dreyfusard notoire d’accéder à la présidence.
.
C’est tellement gros qu’on y croit pas et, pour un fois, on aura raison !
.
.

Aucun commentaire: