mardi 7 décembre 2010

Le gouvernement en voudrait-il à Facebook et WikiLeaks ?

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Mardi 7 décembre 2010 :
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On pourrait se poser la question après l’épisode unique d’un ministre de la République oubliant toute retenu et appelant à ce que le site WikiLeaks ne soit plus hébergé en France. Voilà que maintenant ce même ministre change de registre et passe à Facebook.
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Concernant WikiLeak, je rappelle que le gouvernement a manqué de chance. OVH, le prestataire français a lui aussi saisi la justice pour savoir s’il était dans son bon droit. Et la justice a tranché, ou plutôt n’a pas tranché. La justice, à juste titre, pense qu’un débat de fond doit avoir lieu sur le sujet. Conséquence directe de cette prise de décision, les trois recours intentés contre OVH visant à interdire WikiLeaks ont été rejetés.
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En droit français, c'est la loi sur la confiance dans l'économie numérique de 2006 qui définit la procédure à suivre pour l'éventuelle interdiction d'un site Internet. En dehors des cas particuliers des sites pédopornographiques et des sites de paris illégaux, il faut qu'une plainte ait été déposée pour que le tribunal, s'il constate le caractère "manifestement illicite" d'un site Web, puisse ordonner son interdiction. Or, aucune plainte n'a pour l'heure été déposée en France contre WikiLeaks.
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Et voilà que notre ministre de l’économie numérique, décidément en verve, a déjà trouvé une nouvelle cible. Il a contacté Facebook pour lui demander de supprimer les appels à manifestations non déclarées auprès des préfectures, et pour identifier plus rapidement les auteurs.
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On se souvient qu'avant l'été, de nombreux apéros géants avaient été organisés via Facebook. A Nantes, l'une de ces fêtes avait viré au drame, avec la mort d'un jeune qui avait sauté d'un pont avec 2,4 grammes d'alcool dans le sang. Plutôt que de blâmer l’inconscience de l'un des participants, ou de reconnaître que ce type d'accident fait souvent les pages des faits divers dans les journaux locaux, la presse en avait fait le procès de Facebook et de ses manifestations spontanées.

Dsons le tout net : je ne suis pas un fervent défenseur de Facebook. Il a ses qualités et ses défauts. Mais il faut remettre tout cela dans le contexte et ne pas se tromper de cibles.
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WikiLeaks met des documents confidentiels en ligne. Mais au lieu de blâmer la prose des diplomates américains, au lieu de se demander comment des documents pareils ont pu se retrouver en ligne, au lieu de se poser la question du rôle réél de la diplomatie, on préfére crier haro sur le baudet.
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Facebook permet d’organiser des manifestations « spontanées ». Mais au lieu de se demander ce qui pousse à l’apparition de ces manifestations, le gouvernement préfére prendre contact avec Facebook par le ministère de l'intérieur et par le secrétariat d'État chargé du développement de l'économie numérique, afin de mettre en place des procédures pour rappeler les règles en vigueur, pour éventuellement supprimer les appels à une manifestation illicite, et pour en identifier les auteurs.
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Le droit de manifester étant reconnu en France, le terme "manifestation illicite" ne peut viser que celles qui n'ont fait l'objet d'aucune demande d'autorisation préalable en préfecture, ce qui est le cas de l'énorme majorité des appels à manifester lancés sur Facebook.
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Enfin, n’oublions pas non plus qu’une proposition de loi est dans les tuyaux qui vise à encadrer spécifiquement les manifestations organisées par Internet, en obligeant à désigner un organisateur qui assumera la responsabilité. A défaut, la manifestation pourrait être interdite par la préfecture.
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