vendredi 22 juillet 2011

Il y a cent ans : Revue de presse du 17 au 23 juillet 1911

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Vendredi 22 juillet 2011 :
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Une petite revue de presse centenaire et cent pour cent subjective des événements qui se sont déroulés l’été 1911 par le biais de la « bible » de la presse nationale de l’époque : « Le Petit Parisien »
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Lundi 17 juillet 1911 :
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Maroc : Complet statuquo et la presse internationale fait du remplissage pour cacher que rien ne filtre des négociations se déroulant à Berlin

Sécheresse : « Paris sans eau » titre les journaux parisiens à la suite de l’annonce par la Préfecture de la Seine, de la suspension de l’alimentation en eau de source chaque nuit, de minuit à six heures du matin. Cette annonce crée la colère car arrivant après des constatations de coupures, effectives depuis la nuit du 15 juillet.
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De plus, les coupures ne concernent pas seulement l’eau potable, mais aussi les réseaux secondaires comme celui des pompiers. Conséquence néfaste de cette coupure, les pompiers parisiens appelés sur un feu d’immeuble Rue de Charonne, sont quasiment obligés de laisser l’incendie se développer, faute d’eau suffisante et de pression quand ils obtiennent enfin l’eau.
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Bâtiment : Après un « trêve des confiseurs » dû aux fêtes nationales, le monde du bâtiment est dans l’expectative pour savoir comment vont réagir salariés et patrons désormais. La presse quotidienne est dans l’expectative de ce lundi crucial.

« La trêve des jours fériés va se trouver rompue ce matin. La reprise du travail, escomptée par les entrepreneurs du bâtiment, sera-t-elle véritablement appréciable ? Le mouvement prendra t’il au contraire, l'ampleur qu'espèrent les militants syndicalistes ? Dans quelques heures, les parties se trouveront fixées.
(…)
Dans le meeting qu'ils ont tenu hier matin, au Palais d'Eté, rue des Pyrénées devenu un quartier général les maçons et leurs camarades des parties similaires ont examiné les diverses méthodes préconisées pour le débauchage des chantiers et ils ont approuvé les résolutions prises à ce sujet par le conseil syndical. Des incidents sont donc à prévoir ce matin, dès la réouverture des chantiers, qui seront, plus que jamais, étroitement gardés par la troupe et les agents. »

Tour de France : Huitième étape : Marseille - Perpignan (334 km)

Les 43 concurrents encore en course ont pris le départ de la huitième étape du Tour de France (Marseille-Perpignan) hier matin, à trois heures du matin.

« A Narbonne, le peloton de tête était encore compact mais à partir de cette ville. il se désagrégea peu à peu. Malgré la chaleur accablante, Duboc parvint à prendre une légère avance qu'il conserva jusqu'à Perpignan, point terminus de l'étape. »

Les arrivées à Perpignan ont eu lieu dans cet ordre :
1er : Paul Duboc (La Française) en 11 heures 34’
2 : Louis Heusghein (Alcyon) à cinq minutes
3 : Gustave Garrigou (Alcyon) à huit minutes
4 : Emile Georget (La Française) à dix minutes
5 : Albert Dupont (Le Globe) même temps

Aucune remarque sur le manque d’enthousiasme des journalistes du « Petit Parisien » a une victoire d’un coureur de La Française !

Mardi 18 juillet 1911 :

Maroc : « Une patrouille espagnole a arrêté M. Boisset, agent consulaire de France. Elle a voulu l'obliger à lui remettre tes fusils de son escorte. M. Boisset refusa. Le commandant de la patrouille alla en référer à un officier, et déclara à M. Boisset qu'il avait ordre de l'escorter, baïonnette au canon, jusqu'à l'agence consulaire de France, pour bien se rendre compte qu'il ne s'agissait pas de contrebande d'armes.

Ainsi fut fait, et Mr Boisset traversa El-Ksar encadré par des fantassins espagnols. Notre agent a adressé la légation de France une protestation énergique contre de pareils procédés. »

Bâtiment : Le mouvement de grève ne s’étend plus mais ne régresse pas non plus. Le nombre de grévistes et de chantiers fermés reste stable sans pour autant pouvoir dégager une estimation fiable.

Catastrophe : En Allemagne, le train express reliant Bale à Francfort déraille dans le Duché de Bade, à Mulheim, un village à trente kilomètres de Fribourg, Six des huit voitures ont quitté les rails et se sont encastrés les unes dans les autres dans un épouvantable amas de ferraille. Le bilan provisoire fait état de seize morts et une trentaine de blessés dont dix huit graves. Un français est mort, un négociant en vin et six autres sont parmi les blessés dont un attaché à l’ambassade de France en Suisse qui gagnait Berlin pour les négociations.

Sécheresse : La Préfecture de la Seine revoit à la hausse ses prévisions de coupure d’ »eau et annonce désormais des coupures pour une période de huit à dix jours au lieu des deux initialement annoncés.

Le conseil municipal de Paris a voté en juin un emprunt de 125 millions de francs en vu de couvrir l’augmentation de la distribution de l’eau dans la ville. Les travaux devant débuter en septembre et durer deux ans, ce n’est pas avant l été 1913 que la Préfecture pense pouvoir éviter ces coupures sauvages.

Incendie : Un « formidable incendie » a éclaté hier au soir, rue Mercadet, dans le XVIIIème arrondissement, détruisant un entrepôt de fourrage, un garde-meuble et un dépôt de voiture appartenant au taxi parisien. Le feu, déclaré vers vingt heures, n’a été circonscrit que dans la matinée suivante a cause de l’absence d’eau dans les canalisations dû aux coupures de l’été. Le temps que les services remettent la pression, le feu était devenu incontrôlable. Quatre pompiers, trois militaires et un civil ont été blessé durant l’intervention.

Mercredi 19 juillet 1911 :

Maroc : L’arrestation par l’armée espagnole de l’agent consulaire français à El-Ksar suscite l’indignation dans les milieux diplomatique et la France somme Madrid de fournir des explications, de présenter ses excuses et de sanctionner les militaires fautifs. Madrid de son côté refuse tout commentaire arguant qu’elle n’avait pas reçu ni explication, ni confirmation de l’incident, des troupes stationnées à El-Ksar. Madrid avance que si les faits sont prouvés, il ne peut s’agir que d’une regrettable erreur.

Bâtiment : La grève est en train de s’essouffler et les statistiques de la Préfecture semble le montrer avec un accroissement dui nombre des chantiers ouverts, et cela depuis le début de la semaine. Toutefois, la grève semble se déplacer des maçons et paveurs vers les la couverture et la plomberie.

Vermiraux : Début du procès devant le Tribunal Correctionnel d’Avallon de « l’affaire de l’orphelinat des Vermiraux », affaire qui secoua la France durant l’été 1910 quand on découvrit comment était traité par les services sanitaires les orphelins hébergés aux Vermiraux. (Pour plus de renseignement, voir : « Il y a cent ans, revue de presse 1910 » publié durant l’été 2010)

Tour de France : Neuvième étape : Perpignan – Luchon (289 km)

Le départ de la neuvième étape du Tour de France cycliste, Perpignan-Luchon (289 kilomètres), a été donne hier matin à 3 h. 1/2.

Quarante-trois coureurs ont pris le départ après avoir signé au contrôle. Un incident eut lieu au départ. Crupelandt s'aperçut qu'un des tubes du cadre de sa machine avait été débrasé. Il est reparti, après avoir réparé, 40 minutes après le départ officiel.

L’arrivée à Luchon s’est déroulée sous une pluie battante dans l’ordre suivant :
1er : Paul Duboc (La Française) en 12 heures 10’
2 : Emile Georget (La Française) à deux minutes
3 : Marcel Godivier (La Française) même temps
4 : Gustave Garrigou (Alcyon) à dix minutes
5 : Albert Dupont (Le Globe) à dix neuf minutes

Un triplé de La Française, une deuxième victoire consécutive de Paul Duboc et voilà le Tour de France relégué en bas de colonne, en page cinq du journal qui en compte six !

Jeudi 20 juillet 1911 :
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Maroc : L’Espagne présente à la France ses « regrets les plus sincères » à la suite des événements de El-Ksar. Elle annonce aussi la restitution des armes saisis et la nomination immédiate d’un nouveau consul. Enfin, de nouvelles directives sont envoyées aux troupes espagnoles en poste au Maroc pour leur interdire de franchir l’Oued Loukkos, frontière des zones d’influences entre la France et l’Espagne.

Bâtiment : Après une semaine de grève et un mort, l’ouvrier Paul ARMAND, les grévistes décident de stopper le mouvement de protestation et de reprendre le chemin des chantiers. L’avancé majeure de ce mouvement est l’acceptation par le patronat de la journée de neuf heures. Quoique que voté après des heures de discussions, les syndicats sont optimistes sur la suite des événements et publient un texte commun dont voici la teneur :

« Les travailleurs du bâtiment, après avoir entendu les camarades Andrieu. des charpentiers en fer, Pédro, des terrassiers: Bernard, des charpentiers en bois Victor, de la maçonnerie Charier, des scieurs découpeurs et mouluriers à la mécanique Ricordeau, des terrassiers Péricat, de la fédération du bâtiment; Marie, secrétaire de l'union des syndicat de la Seine, et Jouhaux, secrétaire de la G. G.T.. qui ont démontré l’utilité d’un mouvement d’ensemble et surtout d'une entente commune entre toutes les organisations du bâtiment entente qui leur permettra d'accomplir une action énergique, une fois rentrés dans les chantiers, pour arracher, par tous les moyens, la journée de neuf heures et la suppression du marchandage :

Protestent contre les arrestations arbitraires et décident de poursuivre une lutte énergique pour la libération des camarades emprisonnés et la suppression complète du salariat;

S'engagent, d'autre part, à subvenir aux besoins de la famille du camarade, Paul Armand. sans aucune autre intervention que nous considérerions comme portant atteinte à, notre dignité d'ouvriers révoltés, luttant pour l'émancipation totale

S'engagent à rentrer demain jeudi dans les chantiers et à reprendre leur besogne, en attendant les décisions du comité intersyndical qui établira, dans le plus bref délai, le syndicat unique du bâtiment.

Demain, les travailleurs du bâtiment feront neuf heures. »

Sécheresse : A Pantin, un nouvel incendie détruit cette fois-ci une usine d’emballage durant la nuit. De nouveau, le manque d’eau au début de l’intervention des pompiers est pointé du doigt par les services de secours qui mettent en avant un temps de latence beaucoup trop long entre le moment où ils ont demandé le réapprovisionnement en eau des canalisations du quartier et la mise en service effective.

Duel : En 1911, le théâtre peut mener au duel ! C’est ainsi que Henri BERNSTEIN, auteur de la pièce à succès « Après moi » joué au printemps à la Comédie Française et Gustave TERY, le meneur principal des critiques acerbes contre la pièce.qui en viennent à cet expédient pour régler un différent portant sur la valeur de l’œuvre théâtrale.

Le duel se déroula à sept heures du matin au Vélodrome du Parc des Princes. Mr TERY tira le premier et sa balle alla se perdre dans les tribunes. La balle de Mr BERNSTEIN fint quant à elle sa course dans la balustrade. Le constat fut donc celui d’un « duel sans résultat ».

La presse parisienne précise que les deux hommes ne se sont pas réconciliés !
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Vendredi 21 juillet 1911 :
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Maroc : A la suite de l’incident franco-espagnol d’El-Ksar et les regrets exprimés par le gouvernement de Madrid, Paris annonce que ce different est désormais clos. Le gouvernement espagnol exprime sa satisfaction de voir ses explications acceptées par la France

A Berlin toujours aucune fuite sur les négociations en cours entre la France et l’Allemagne au sujet du problème d’Agadir.

Banque : La justice perquisitionne au siège parisien du Crédit Foncier Américain ainsi que dans deux succursales de la région parisienne avant de se rendre au domicile de deux des administrateurs de la banque. Il est reproché au C.F.A. d’avoir émis une très grande quantité de bon au porteur sans aucune valeur, grugeant ainsi plusieurs dizaines de petits épargnants.

Tour de France : Dixième étape : Luchon – Bayonne ( 326 kilomètre)

Un coureur de l’équipe Alcyon emportant l’épreuve, le Petit Parisien fait un article circonstancié de l’étape. Je vous laisse le découvrir in-extenso

« Le départ de !a dixième étape du Tour de France cycliste. Luchon-Bayonne (326 kil.), a été donné hier matin à 3 h 30’, à quarante coureurs, tous très dispos. Ils ont franchi le col de Peyresourde, première difficulté du parcours, avec entrain.

Profitant de son avance, Brocco a produit, sur la fin de l'épreuve, un effort formidable, augmentant encore son avance. Aussi a-t-il triomphé, battant de trente-trois minutes son suivant immédiat. »

L’arrivée à Bayonne s’est déroulée dans l’ordre suivant :
1er : Maurice Brocco (Alcyon) en 13 h 17’
2 : Gustave Garrigou (Alcyon) à 33 minutes
3 : Emile Georget (La Française) à 36 minutes
4 : Ernest Paul (Alcyon) à 37 minutes
5 : Charles Cruppelandt (La Française) même temps

Éliminé lors de la neuvième étape et vainqueur de la dixième, tel est l’étrange destin de Maurice Brocco. Mis hors-course lors de la 9e étape, il profite du règlement qui autorise les éliminés à poursuivre le trajet du Tour sans figurer au classement général. Brocco remporte cette 10e étape afin de montrer à Henri Desgrange sa valeur, puis quitte le Tour 1911. Ce dernier s’en étonne dans les colonnes de L’Auto : « Pourquoi avoir attendu que l’on vous exclue de la course pour faire vos preuves ? ».
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Samedi 22 juillet 1911 :
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Maroc : Nouvel incident franco-espagnol à El-Ksar. Le lieutenant Thiriet, de passage à El-Ksar, est brutalement arrêté par les troupes espagnoles alors qu’il demandait des explications à six anciens soldats chérifiens, déserteurs de la troupe française qu’il commandait, et désormais enrôlé au sein de l’armée espagnole. La nouvelle, arrivée par câble par le biais de l’agence Havas, n’est pas confirmé par le Quai d’Orsay.

Duel : Nouveau duel pour Henri Bernstein qui, cette fois-ci, le met aux prises au redoutable Léon Daudet pour des articles diffamatoires paru dans l’Action Française. Il est intéressant de noter que le règlement de différents par le biais de duel semble être très porteur pour la presse puisque celle-ci, outre le résultat final, publie l’intégralité des modalités du duel.

LES CONDITIONS DU COMBAT
Les conditions demandées par les témoins de M. Bernstein, offensé, sont les suivantes :
La rencontre aura lieu au pistolet, et si elle demeure sans résultat elle sera reprise à l'épée.
Les conditions de la rencontre au pistolet sont les suivantes : quatre balles échangées à 25 mètres, cadence 90 à la minute.
Si la rencontre au pistolet demeure sans résultat, elle sera reprise à l l'épée aux conditions suivantes
1/ Terrain, 15 mètres derrière chaque combattant, rendu une seule fois. Si l'un des combattants dépasse de deux pieds la limite, il sera disqualifié. Le directeur du combat devra prévenir les combattants deux mètres avant la limite;
2/ Tenue des combattants, chaussures de ville, maillot collant ou chemise molle et gants de ville
3/ Chacun ses armes, coquille et longueur des épées réglementaires
4/ Le corps à corps est interdit. Le combat cessera lorsque l'un des combattants, après avoir été mis en observation pendant un quart d'heure, se déclarera dans l'impossibilité de continuer. La durée des reprises est de deux minutes avec repos de deux minutes.
D'un commun accord, la direction du combat est confiée à M. J.-J. Renaud.

Pour ce duel, les deux combattants se blessent mutuellement à l’épée après s’être raté au pistolet. Ce sera finalement Léon Daudet qui sera déclaré vainqueur.

Dimanche 23 juillet 1911 :

Maroc : L’agence Havas fait état d’un nouvel incident à El-Ksar mettant de nouveau en scène le lieutenant Thiriet. Celui-ci a de nouveau été arrêté par l’armée espagnole alors qu’avec trois soldats chérifiens il partait en reconnaissance dans la région d’El-Ksar. La France explique qu’à ce jour, aucune notification d’incident n’a été faite par le Consul Boisset en charge de cette région.

Alors que les négociations entre la France et l’Allemagne se font sous le couvert d’une chape de plomb, il ne fait aucun doute aux observateurs attentifs qu’on se dirige vers un accord « de compensation » en Afrique, l’Allemagne laissant à la France et l’Espagne le Maroc, contre d’autres régions du monde. Cette perspective pousse Lloyd George, ministre des Finances anglais mais surtout spécialiste des colonies et des négociations, a tenir un discours offensifs à la Chambre des Communes :

« Je ferai de grands sacrifices pour maintenir la paix, et je n'admets pas que rien puisse justifier une perturbation dans les bons rapports internationaux, sauf les questions d'un très grave intérêt national.

Mais si nous nous trouvons acculé à une situation ou la paix ne pourrait être maintenue qu'en sacrifiant la grande, la bienfaisante situation que la Grande-Bretagne s'est acquise par des siècles d'héroïsme et d’effort, en permettant que la Grande-Bretagne soit traitée - quand ses intérêts sont en jeu - comme si elle ne comptait pas dans le concert des nations, alors je le dis avec force la paix à ce prix serait une humiliation intolérable à endurer pour une grande nation comme la nôtre. »

Tour de France : Onzième étape : Bayonne – la Rochelle (379 kilomètre)

Le départ de la onzième étape Bayonne – la Rochelle (379 kil.) a été donné hier matin, à trois heures, au milieu d'une affluence nombreuse, malgré l'heure matinale.

Brocco n'a pu prendre le départ, l'U.V.F. ayant définitivement homologué la disqualification que prononça contre lui le juge arbitre de la course lors de la neuvième étape.

A La Rochelle (379 kil.), les arrivées ont eu lieu dans cet ordre
1er : Paul Duboc (La Française) en 12 heures 58’
2 : Emile Georget (La Française) à douze minutes
3 : Charles Cruppelandt (La Française) à 39 minutes
4 : Gustave Garrigou (Alcyon) à 52 minutes
5 : Marcel Godivier (La Française) même temps
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