vendredi 29 juillet 2011

Il y a cent ans : Revue de presse du 24 au 30 juillet 1911

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Vendredi 22 juillet 2011 :
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Une petite revue de presse centenaire et cent pour cent subjective des événements qui se sont déroulés l’été 1911 par le biais de la « bible » de la presse nationale de l’époque : « Le Petit Parisien »
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Lundi 24 juillet 1911 :

Armée : A la suite de plusieurs incidents de procédures opposant plusieurs haut gradés de l’armée française, il est né une polémique des plus néfastes pour l’Etat-major concernant les moyens de défense du territoire national mis en place par la République Française, polémique ayant donc atteint désormais la presse
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Depuis longtemps déjà, le vice-président actuel du conseil supérieur de la guerre, le général MICHEL est en désaccord, avec la plupart de ses collègues, sur un certain nombre de points importants touchant la conduite des troupes au combat. Ce désaccord n'a fait que s'accentuer au cours des dernières séances du conseil supérieur, où l'unanimité des membres s'est manifestée à plusieurs reprises contre l'opinion isolée du vice-président.

La presse nationale demande donc au Ministre de la Guerre, Mr MESSIMY, d’intervenir pour faire cesser cette situation intolérable et donner des directives claires à l’ensemble de l’Etat-major.

Incendie 1 : La forêt de Fontainebleau est la proie des flammes. L’incendie s’étant déclaré dans la journée de dimanche, au Mont Hussy, gagne en intensité et en territoire, en atteignant le Mail Henry IV puis le carrefour des Forts de Marlotte. Fort heureusement, le vent pousse le feu à l’opposé de la ville de Fontainebleau.

Incendie 2 : Toujours les incendies en cet été torride : le quartier Stramboul à Constantinople est la proie des flammes sans que la dépêche de l’Agence Havas reprise par tous les quotidiens français ne précise ni le nombre de victime, ni l’étendue des dégâts, à l’exception du fait que le Ministère de la Guerre ottoman est menacé par les flammes et que la population s’est réfugié sur les bords de la mer de Marmara.

Apaches : le retour des apaches qui, depuis le début de l’été, se tenaient bien tranquille avec la descente nocturne sur Corbeil d’une bande à l’origine inconnue qui terrorise une nuit durant la petite bourgade. Trois corbeillois, en trois lieus différents, sont roués de coup avant d’être dépouillés et laissés pour mort, avant qu’un débit de boisson ne soit complètement dévasté par une troupe d’une vingtaine de jeunes apaches.

Mardi 25 juillet 1911

Armée : Le général MICHEL, chef d’Etat-major des armées françaises, présente au Conseil de guerre, son plan XVI. Celui-ci propose une attente défensive et un élargissement du front jusqu'à la Belgique en mobilisant tous les réservistes. Il est rejeté à l'unanimité par les membres du Conseil, avalisant ainsi la crise de confiance au sein des plus hautes instances militaires françaises.

Incendie 1 : Les trombes d’eau qui s’abattent sur la région parisienne permettent, mieux que les secours, d’éteindre l’incendie qui dévorait la forêt de Fontainebleau. Pourtant, c’est près de mille hectares qui ont été dévorés par les flammes.

Grace au travail du régiment des Dragons qui a creusé de multiple coupe-feu, le sinistre a évité la poudrière de Marlotte, évitant ainsi un drame à la ville de Fontainebleau toute proche.

Incendie 2 : le quartier de Stramboul à Constantinople est complètement détruit par les flammes d’un incendie maitrisé aux premières lueurs de l’aube. Le bilan est accablant : une quarantaine de morts, chiffres provisoires, dix mille maisons détruites, vingt cinq millions de francs de dégâts, le théâtre, seize mosquées, deux couvents derviches et plusieurs bâtiments ministériels partis en fumée.

Tour de France : Douzième étape La Rochelle – Brest (470 kilomètres)

La Française survole cette étape tandis que l’équipe Alcyon s’effondre littéralement. Bilan, deux petites lignes seulement dans le Petit-Parisien !

« La douzième étape du Tour de France cycliste, la plus longue, puisqu'elle est de 470 kilomètres, s'est disputée hier sur le parcours la Rochelle-Brest. Le départ a été donné dimanche soir à dix heures et les arrivées ont eu lieu à Brest dans l'ordre suivant » :

1er : Marcel Godivier (La Française) en 17 h 40’
2 : Julien Maitron (La Française) à 28 minutes,
3 : Charles Cruchon (La Française) à 35 minutes,
4 : Emile Georget (La Française) à 50 minutes
5 : Alfred Faure (Automoto) à 52 minutes,

Mercredi 26 juillet 1911 :

Disparition : La presse mondiale est secouée par la disparition accidentelle de l’actrice de théâtre et chanteuse, Mathilde FOSSEY connue du grand public sous le nom de Geneviève Lanthelme-Edwards. Elle fut la cinquième épouse d’Alfred EDWARDS, richissime homme d’affaires, patron de presse, journaliste et propriétaire de l’Odéon.

La presse de l’époque reprendra en gros titres que la comédienne s’est fait enterrer avec ses bijoux. Ce qui devait arriver arriva. Le 27 décembre 1911, deux malandrins violèrent la tombe, sans trouver de joyaux. Lors de l’enquête de Police qui s’en suivie, un incendie accidentel dans la chapelle sépulture se déclencha, nécessitant l’intervention des pompiers. Les parisiens, pas avare de bon mot, expliquèrent que cela conférait à la défunte une seconde noyade...

Maroc : A Berlin, les négociations entre la France et l’Allemagne se poursuivent dans le plus grand secret tandis que le croiseur allemand Berlin continue à croiser à proximité d’Agadir.

Concernant le différent franco-espagnol suite aux incidents successifs s’étant déroulé à El-ksar, là aussi l’heure est à l’apaisement avec la rencontre à Saint Sébastian des Ministres des Affaires Etrangères français et espagnol. Les deux parties espèrent arriver rapidement à un accord sur cette zone marocaine.

Armée : le Ministre de la Guerre, Mr MESSIMY, après avoir rencontré le Président FALLIERES, laisse entendre de profonds remaniements dans la chaine de commandement et annonce la probable nomination du général PAU à la tête du principal groupe d’armées françaises.

Incendie : La presse se pose la question de connaître l’origine du feu qui a ravagé une grande partie de la ville de Constantinople. L’hypothèse d’un acte terroriste provenant soit de groupes dissidents kurdes, soit de groupes arméniens, est avancé par la presse parisienne qui s’étonne de la rapidité de propagation de l’incendie et que le Ministère de la Guerre se soit retrouvé au cœur du foyer.

Duel : La presse se fait l’écho de cette demande, incroyable de nos jours, mais pourtant parfaitement sérieuse en 1911. Je vous livre in-extenso l’entrefilet du Petit-Parisien :

« UN NOUVEAU DUEL DE M. BERNSTEIN

On sait que M. Lacour, secrétaire général des Camelots du roi, actuellement détenu à Clairvaux, avait envoyé ses témoins, MM. Pujo et Dubloc, à M. Henry Bernstein, M. Lacour avait demandé au garde des Sceaux une mise en liberté momentanée afin de pouvoir se battre.

Cette autorisation lui ayant été refusée, son premier témoin M. Maurice Pujo, a demandé, du consentement de son « client », à lui être substitué comme adversaire de M. Bernstein. Cette substitution a été acceptée. Une rencontre à l'épée aura lieu ce matin aux environs de Paris. »

Jeudi 27 juillet 1911 :

Inondés de 1910 : La lutte contre le fisc reprend. Quatre sinistrés qui ont refusé de payer leurs impôts doivent subir la visite des huissiers et la vente immédiate de leurs biens. La presse s’en émeut et appellent les parisiens à la résistance tandis que les autorités dénoncent cet attitude et mettent en garde les éventuels manifestants des conséquences de leurs actes.

Pollution : Des milliers de poissons morts sont repêchés dans la Seine entre le Pont de l’Alma et la Seine. De rapides analyses ont permis de déterminer que la mort était du à un empoisonnement au chlore, le taux de ce produit dans l’eau de la Seine étant prohibitif. La provenance de cette pollution est inconnue mais la Préfecture pense que le poison est arrivé dans le fleuve via le collecteur se jetant à hauteur du Pont de l’Alma. Elle avance l’hypothèse d’une fuite accidentelle dans une usine quelconque de la banlieue parisienne qui aurait été évacué dans le collecteur suite aux pluies diluviennes de la nuit précédente.

La Préfecture recommande de ne pas se baigner dans la Seine !

Taxe sur les carburants : Une nouvelle poussée de fièvres agite la corporation des chauffeurs de taxis et les usagers de véhicules automoteurs à la suite de l’annonce d’une éventuelle augmentation de la taxe sur le benzol.

La dernière poussée de fièvre de cette corporation date du 24 mai 1911 pour les mêmes motifs. Les chauffeurs de taxi parisiens s’étaient mis en grève pour « protester contre l’augmentation du prix des carburants, préjudiciable à leur activité » Des incidents avaient éclatés entre grévistes et la petite trentaine de non grévistes ayant abouti à l’incendie de l’un des taxis et plusieurs dizaines de pneus crevés.

Tour de France : Treizième étape Brest – Cherbourg (406 km)

Le départ de la treizième étape a été donné hier matin à une heure. L'arrivée à Cherbourg a eu lieu au milieu d'une grande affluence.

Voici les résultats :
1er : Gustave Garrigou (Alcyon) en 13 heures 44 minutes
2 : Henri Cornet (Le Globe) à une demi-longueur
3 : Albert Dupont (Le Globe) à une longueur,
4 : Constant Menager (Le Globe) à une longueur
5 : Charles Cruchon (La Française) à dix minutes

« L'aviateur Aubrun qui assistait à l'arrivée a offert deux prix de 50 francs et un prix de 100 francs qui ont été respectivement attribués à Paulmier, premier régional Deman, premier isolé, et à Garrigou, premier du classement général.

Une fois de plus, Alcyon triomphe avec Garrigou. Cette victoire n'étonne nullement de Garrigou d'abord merveilleux champion aux muscles d'acier; de la bicyclette Alcyon ensuite, véritable machine de précision, solide et légère tout à la fois. »

Vendredi 28 juillet 1911 :

Armée : Lors du Conseil des Ministre, le Ministre de la Guerre , Mr MESSIMY annonce les remaniements à la tête de l’Etat-major des Armées françaises à la suite de la crise de commandement qui a secoué cet institution au début du mois. A la surprise générale, ce n’est pas le général PAU qui hérite du poste suprême de généralissime mais le général JOFFRE. Le premier nommé a en fait refusé cette nomination pour raison personnelle. Comme le précise la presse, c’est en fait parce qu’il s’oppose au fait que le gouvernement aura son mot à dire dans la nomination de son Etat-major. En fait, JOFFRE est nommé faute d’autre candidat.

Inondés de 1910 : De violents échauffourées éclatent dans les douzièmes et quinzièmes arrondissements lorsque les forces de l’ordre veulent opérer les saisies sur les biens de deux des quatre sinistrés n’ayant pas payé leurs impôts. Plusieurs dizaines d’interpellations ont lieu avant que les affrontements cessent après que l’un des sinistrés paye à l’huissier un accompte sur impôt de 321 francs.

Sécheresse : La pesse s’inquiète des températures anormalement hautes dans la capitale, de l’ordre de 32,7 degré depuis plus de dix jours et des effets de la sécheresse, les pluies diluviennes de la nuit du 25 au 26 ayant été trop forte pour pouvoir combler le manque d’eau de la région. Conséquence directe de cette sécheresse qui persiste : le préfet de la Seine ordonne maintenant des coupures d’eau en journée en plus des coupures nocturnes existantes.
Peut être une conséquence de cette canicule persistante : le service des statistiques annonce 925 décès pour la semaine 29 au lieu de 878 la semaine 28 ou des 890 de moyenne ordinaire.

Samedi 29 juillet 1911

Maroc : A la Chambre des Communes, Mr Asquith, Premier Ministre du roi Georges V, présente dans un discours qui reçoit l’appui de Lord Balfour, le leader de l’opposition, la position de la Grande-Bretagne dans cette affaire.

Dans ce discours, Mr Asquith déblaie complètement le terrain diplomatique en remettant chaque élément intéressé à sa place exacte.

D'une part, l’Angleterre affirme qu'elle suit les négociations franco-allemandes sans y intervenir, laissant au gouvernement de la République Française toute latitude pour traiter avec celui de Guillaume II et se défend de vouloir exercer la moindre pression sur les parties en présence.

D'autre part, proclamant une fois de plus l'efficacité éventuelle de l'entente cordiale, M. Asquith montre que son pays serait prêt à prendre part aux débats, si une solution satisfaisante pour la France et pour l'Allemagne n'était pas enfin réalisée, solution qui, néessairement, ne porterait aucun préjudice à l'Angleterre.

Le traité franco-anglais de 1904, l'acte d'Algésiras et le souci des intérêts anglais feraient de cette immixtion un triple devoir pour le cabinet de Londres.

Catastrophe : Au grand Quevilly, la firme Saint Gobain a entreprit de construire une usine. Or, un « grand cyclone » toucha la région en début d’après-midi, faisant d’énormes dégâts et surtout dix morts et seize blessés donc six grèves sur le chantier de l’usine lorsqu’un bâtiment en construction s’effondra sur eux.

Théâtre : De graves incidents entre machinistes se déroulent en pleine représentation. La rixe éclate entre le chef machiniste, appartenant au Parti Communiste, aidés par trois autres machinistes de la même obédience, et les machinistes non syndiqués, lorsque le chef machiniste voulu licencier sur le champ un ouvrier coupable d’une faute grave selon lui. Deux blessés, dont le chef machiniste, furent conduits à l’hôpital.

La direction du théâtre, dès le lendemain, licenciait tous les machinistes non syndiqués pour éviter tout nouveau problème.

Tour de France : Quatorzième étape – Cherbourg – Le Havre (367 kilomètre)

Je vous laisse deviner qui a remporter l’étape en lisant le compte-rendu intégral du Petit-Parisien : « Le départ de la quatorzième étape du Tour de France cycliste, Cherbourg-Le Havre, 367 kilomètres, a été donné hier matin, à quatre heures. Voici l'ordre des arrivées au Havre »

1er : Paul Duboc (La Française) en 12 heures 04’
2 : Emile Georget (La Française) à une demi-longueur
3 : Charles Cruppelandt (La Française) à 16 minutes
4 : Charles Cruchon (La Française) à une longueur,
5 : Gustave Garrigou (Alcyon) à 41 minutes

Dimanche 30 juillet 1911 :

Canicule : La capitale est au prise avec une vague de chaleur comme elle n’en avait pas connu depuis très longtemps. A 14 h 30’ ? l’observatoire de Montsouris relève une température de 36,6 DC. Conséquence directe, les administrations annoncent plusieurs mesures :

La Préfecture de la Seine annonce de nouvelles coupures d’eau dans la capitale pour pallier les effets de la sécheresse qui sévit dans les environs de la capitale.

Les P.T.T. suppriment la quatrième tournée de 14 h 30’ ainsi que la troisième tournée d’imprimées faite traditionnellement à 11 h 30’. Le courrier de ces tournées supprimées seront distribués lors de la dernière tournée de la soirée, celle de 17 h 30’.

Les établissements de bains annoncent pour leur part des plages d’ouvertures aggrandis pour accueillir un maximum de monde.

Progrès technique : Coup sur coup, les militaires font deux premières dans le domaine des transmissions. : Un message est envoyé d’un avion par le biais du télégraphe sans fil. D’un autre côté, ils annoncent l’ouverture d’un nouveau poste de transmission à Fez.

Escroquerie : Les services des douanes mettent au jour une escroquerie touchant un grossiste en vin qui « mouillait » le vin transitant par son entrepôt. La fraude est évaluée à plusieurs millions de francs, aggravée par le fait que la coopérative, installée à Levallois, possédait six succursales.
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