vendredi 8 juillet 2011

Il y a cent ans : Revue de presse du 2 au 9 juillet 1911

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Vendredi 8 juillet 2010 :
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Une petite revue de presse centenaire et cent pour cent subjective des événements qui se sont déroulés l’été 1911 par le biais de la « bible » de la presse nationale de l’époque : « Le Petit Parisien »
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Petite remise en perspective : Au début du XXe siècle, la France, qui occupe l'Algérie colonisée depuis 1830, se préoccupe de la sécurité de sa frontière avec le Maroc, tout en lorgnant sur ce pays. Le royaume chérifien était alors l'un des derniers pays non colonisés d'Afrique, et suscitait la convoitise de plusieurs puissances européennes, au premier rang desquelles la France, ainsi que celle de l'Allemagne qui estimait avoir un retard à rattraper en matière de colonies.

En 1904, la France et la Grande-Bretagne concluent, contre l'Allemagne, un accord d’« Entente cordiale » : la France laisse les mains libres à la Grande-Bretagne en Égypte, et en contrepartie, peut instaurer un protectorat au Maroc.

En mars 1905 pour rappeler ses prétentions sur le Maroc, l'empereur Guillaume II débarque à Tanger et rencontre le sultan Moulay Abd al-Aziz. C'est le « coup de Tanger », qui provoque des tensions entre les puissances européennes. Pour apaiser ces tensions, se tient, en 1906, à Algésiras, une conférence internationale. L'Allemagne s'y voit reconnaître un droit de regard sur les affaires marocaines, alors que la France et l'Espagne obtiennent des droits particuliers sur le Maroc en matière de police et de banque.

En mars 1911 le sultan Moulay Abd al-Aziz menacé par une révolte, demande à la France de lui prêter main forte. En mai, les troupes françaises occupent Rabat, Fès et Meknès. L'Allemagne, inquiète pour ses prétentions sur le Maroc, considère cette occupation comme une violation des accords d'Algésiras et décide de réagir.

Dimanche 2 juillet 1911 :
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Maroc : Le titre est fort et barre la « une » de la plupart des quotidiens français « L’Allemagne envoie une canonnière à Agadir ». Et d’expliquer dans la foulée que la nouvelle provient d’un communiqué de l’ambassade d’Allemagne à Paris après que l’ambassadeur allemand, Mr De SCHOEN ait rencontré le Ministre français des Affaires Etrangères, Mr De SELVES.

L’ambassadeur a longuement insisté sur le fait qu’il s’agissait « de défendre les intérêts économiques allemands » et non d’une « mission hostile » à but colonialiste. L’ambassadeur allemand a aussi souhaité que « la France et l’Allemagne gardent les excellentes relations qui sont les leurs »

L’Espagne, elle aussi fortement impliquée dans la région, a réitéré ses gages comme quoi ses troupes ne franchirait pas le Loukkos qui sépare la zone sous influence française de celle sous influence espagnole.
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Saisies mouvementées : En 1910, la Seine a dramatiquement débordée, envahissant Paris, causant des milliards de francs d’époque de dégâts. Des centaines de parisiens se sont retrouvés dans le dénuement le plus complet et de nombreux commerçants et industriels ont perdu leurs outils de travail.

Lors de la levée d’impôt de 1911, plusieurs dizaines de ses sinistrés n’ont pu ou n’ont pas voulu les acquitter, poussant le gouvernement à faire procéder à des saisies pour couvrir les taxes.

Le samedi 1er juillet 1911, les forces de l’ordre tentent de procéder à la saisie des biens de deux commerçants de l’avenue Ledru-Rollin. Des centaines de manifestants tentent de s’y opposer. La tension est si vive que les forces de l’ordre font alors appel à des unités de l’armée pour tenter d’accomplir la mission qui leur est confié.

Celle-ci, sans ménagement, mais sans faire usage de ses armes, parvient à dégager l’avenue après trois heures d’effort permettant à l’huissier et au commissaire en charge de la saisie d’arriver devant les deux commerces. « C’est en enfonçant les devantures à coup de madrier que les forces de l’ordre peuvent enfin accomplir leur devoir », devoir fait sous la protection de l’armée et de charges des gardes à cheval pour dégager les rues adjacentes.
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Chemin de fer : La direction des Chemins de fer de l’Ouest-Etat annonce l’ouverture de quatre nouvelles voies dans la « tranchée des Batignolles », goulot d’étranglement menant à la Gare Saint Lazare (Voir les articles de l’année dernière où plusieurs fois ce sujet est abordé).

La direction espère grâce à cet aménagement, réduire à dix minutes le retard des trains en partance ou à l’arrivée de cette gare et résorber totalement le retard lors de la réorganisation des services en septembre …
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Lundi 3 juillet 1911 :
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Maroc : Après l’envoi de la cannonière allemande « Panther » à Agadir, Rome et Vienne réagissent fermement, condamnant la décision de Berlin.

A Paris, le cabinet de crise s’est réuni mais rien ne filtre des décisions prises. Par contre, une rumeur enfle à Brest laissant entendre le départ pour Agadir d’un croiseur et de plusieurs bâtiments plus légers.

Au niveau diplomatique, un intense ballet diplomatique se déroule entre la France, le Royaume-Unis et la Russie sans pour autant qu’une décision finale ne soit prise.

Tour de France : Première étape : Paris – Dunkerque (351 km)

« La grande bataille sportive qui, sur plus de 5000 km, vont se livrer les coureurs professionnels du Tour de France a commencé hier. Plus de quatre vingt concurrents se sont élancés vers le nord et seront de retour à Paris à la fin de ce mois après avoir bouclé une immense boucle passant par Dunkerque, Belfort, Chamonix, Nice, Perpignan, Bayonne, Brest et Le Havre.

Le contrôle de départ, installé place de la Concorde, a été ouvert à 1 h 30’ du matin. A 2 h 30’ la distribution des brassards et la signature des concurrents sur le registre de départ étaient terminés et le peloton de coureurs précédés par des voitures officielles prenait par les Champs Elysées et Neuilly la route de la Grande Halle où, après un dernier contrôle, les quatre vint trois coureurs, au signal du starter, démarrèrent à toute allure.
(…)
A 4 h 32’ de l’après midi, l’arrivée à Dunkerque se déroulaient au milieu d’une affluence énorme. »

Les arrivées à Dunkerque ont eu lieu dans cet ordre :
1er : Gustave Garrigou (Alcyon) sur bicyclette Alcyon en 12 h 32’
2 : Jules Masselis (Alcyon) à une demi-longueur
3 : François Faber (Alcyon) à une longueur
4 ; Marcel Godivier (La Française) à 12 minutes
5 : Georges Passerieu (La Française) à 32 minutes

Ce sont en fait 84 coureurs qui prennent le départ dont 37 sont groupés en équipes, l’une étant l’éternelle Alcyon, équipe de la marque de vélo du même nom, l’autre son éternelle rivale, « La Française ». les 47 coureurs restant sont des coureurs « isolés », courant sans aucune aide extérieure.

Certains coureurs utilisent pour la première fois sur le Tour des bicyclettes équipées de systèmes de changement de vitesses.

Mardi 4 juillet 1911 :

Maroc : La réunion d’un conseil de cabinet spécialement dédié à l’affaire d’Agadir est prévu dans l’après-midi après que le Ministre des Affaires Etrangères ait fait le point de la position des puissances européennes sur ce dossier brulant.

La presse française publie la note du gouvernement allemand sur les causes de son intervention : « Des maisons allemandes qui ont es affaires dans le sud du Maroc et particulièrement dans les environs d’Agadir, se sont inquiétés d’une certaine agitation qui régnait parmi les tribus de cette région et qui semblait avoir été provoquée par les derniers événements survenus dans d’autres parties du pays. Ces maisons se sont adressées au gouvernement impérial en lui demandant aide et protection pour leur vie et leurs biens.

Le gouvernement a fait droit de cette demande en décidant d’envoyer un navire de guerre à Agadir pour aider et secourir en cas de besoin, les sujets et protégés allemands et pour veiller en même temps aux intérêts allemands qui sont considérables dans ces régions.

Dès que l’ordre et la tranquillité seront revenus au Maroc, le navire chargé de cette mission protectrice quittera le port d’Agadir. »

Hollande : Amsterdam attend la visite du Président de la République française, M.FALLIERES où il doit rencontrer la reine WILHELMINE. La Hollande, proche de l’Allemagne, attend beaucoup de cette visite qui, elle l’espère, lui permettra de montrer son indépendance vis-à-vis du géant voisin.

Mercredi 5 juillet 1911 :

Maroc : L’Allemagne annonce que la canonnière Panther va être remplacée le plus rapidement possible par le croiseur Berlin, armé de dix canons de 105 mm et dix autres canons de 37 mm. C’est donc un navire à forte puissance de feu et à l’équipage conséquent qui remplace un navire de faible capacité.

A Londres et Paris, les conseils de cabinet succèdent aux conseils de cabinet sans pour autant qu’une ligne de conduite, éventuellement commune, apparaisse.

Hollande : Amsterdam, en liesse, accueille le président Armand FALLIERES qui rencontre immédiatement la reine WILHELMIN pour évoquer les relations de la Hollande avec la France et leur voisinage immédiat qu’est l’Allemagne.

Tour de France : Deuxième étape : Dunkerque - Longwy (388 km)

Les 81 coureurs encore en course après la première étape s’élancent à 2 h 30’ du matin à destination de Longwy. Dès le début de la course, un groupe de dix coureurs se détacha et resta en tête jusqu’au franchissement de la ligne d’arrivée à 4 heures de l’après-midi

Les arrivées à Longwy ont eu lieu dans cet ordre :
1er : Jules Masselis (Alcyon) sur bicyclette Alcyon en 13 h 30’
2 : François Faber (Alcyon) à une demi-longueur
3 : Gustave Garrigou (Alcyon) à une demi-longueur
4 ; Emile Georget (La Française) à une longueur
5 : Marcel Godivier (La Française) à une longueur

« Encore une fois, dans la deuxième étape, les bicyclette Alcyon fait merveille. Roulante, légère, la machine bleu ciel a permis aux géants de la route de gagner cet étape du Tour de France »
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Jeudi 6 juillet 2011 :
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Maroc : Les puissances concernées par l’affaire d’Agadir envisage des pourparlers en commun regroupant, outre l’Allemagne et la France, l’Espagne et le Royaume-Uni. Londres considère en effet être intéressé par le règlement de la crise en tant que première puissance coloniale mais Paris regarde avec circonspection cette demande.

Berlin, de son côté, veut hâter les négociations pour empêcher les autres puissances d’aboutir à un accord sur le dis des intérêts allemands.

Hollande : Après Amsterdam, le Président français se trouve à La Haye, siège du gouvernement hollandais, où il rencontre les plus hautes autorités politiques et civiles du pays.
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Vendredi 7 juillet 2011 :
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Maroc : Les chancelleries européennes ne sont pas du tout sur la même longueur d’onde. Alors que Berlin envisage d’ouvrir des négociations exclusivement avec Paris, Londres de son côté veut y être associé et réclame que Madrid soit aussi présente.

Sur le terrain, les troupes espagnoles, sous les ordres du lieutenant-colonel Sylvestre, en provenance de Tanger, sont entrées au Maroc et campent désormais sous les murs de Errassouli.

Hollande : Le président français, Armand FALLIERES, rencontre à Amsterdam les milieux économiques et financiers hollandais ainsi que les entrepreneurs français installés aux Pays-Bas. Dernier jour de la visite française, les journaux des deux pays en profitent pour faire un premier bilan de ces trois jours et louent la bonne entente régnant entre les deux puissances.

Tour de France : Troisième étape : Longwy – Belfort (388 km)

Les 78 coureurs qui prennent le départ à Longwy s’élancent à trois heures du matin avec pour objectif Belfort via Nancy et Remiremont. Dix heures et cinquante minutes plus tard, Faber franchit en vainqueur la ligne d’arrivée.

Les arrivées à Belfort ont eu lieu dans cet ordre :
1er : François Faber (Alcyon) sur bicyclette Alcyon en 10 h 50’
2 : Gustave Godivier (La Française) à 27 minutes
3 : Gustave Garrigou (Alcyon) à 29 minutes (Alcyon)
4 ; Paul Duboc(La Française) à 32 minutes (La Française)
5 : Georges Paulmier (Automoto) sur bicyclette Automoto, même temps

« Encore une fois, la troisième sur trois étapes, les bicyclette Alcyon remporte la victoire. Quelle que soit la difficulté de l’étape, Alcyon, ne voulant pas mentir à sa réputation, soutient son glorieux rang. On ne peut moins attendre de la bicyclette bleu ciel qui n’a jamais connu que des triomphes. ».
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Samedi 8 juillet 1911 :
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Maroc : L’affaire d’Agadir quitte la « une » de la presse parisienne pour se retrouver en page intérieure. Il est vrai que la situation semble, pour l’instant bloqué, l’Allemagne et la France campant sur leurs positions respectives, même si elles sont d’accord sur le principe qu’un règlement diplomatique à la crise doit être trouvé.

Faits divers : Les journaux parisiens font la « une » avec l’insécurité régnant à Paris et dans les régions françaises. Ils racontent l’assassinat particulièrement violent d’une matelassière de 22 ans, séquestrée, violée puis égorgée par deux jeunes gens n’ayant pas encore vingt ans. Ils racontent le braquage d’une banque de Suresnes et la mort du caissier, tué d’une balle en pleine tête par l’un des assaillants. Ils racontent enfin le meurtre gratuit par deux journaliers d’un jeune garçon de huit ans lapidé par jeu à coup de pierre avant d’être jeté encore vivant dans le Rhône où il se trouva la port

Catastrophe : Le rapide du réseau Ouest-État reliant Paris-Saint-Lazare au Havre déraille alors qu’il passait sans stopper dans la gare de Mantes. Fort heureusement, aucun mort n’est à déplorer même si les secours relèvent une vingtaine de blessé dont quatre graves. La presse s’empresse de relever que de nouveau, c’est le réseau Ouest-État qui est victime d’un accident et lance une violente polémique sur la sécurité des chemins de fer français et leur sous effectif chronique.

Dimanche 9 juillet 2011 :

Maroc : La France envoie un émissaire à Berlin pour sonder les intentions allemandes que Paris trouve toujours confuse. Il ne fait aucun doute pour les nations européennes que le motif invoqué par les allemands, à savoir sauvegarder les interets des ressortissants allemands, menacées par les insurrections marocaines, n’est qu’un pretexte qui cache des intentions peu louables.

Tour de France : Quatrième étape : Belfort – Chamonix (344 km)

Le départ de Belfort est donné à 3 h 10 ‘ du matin et les 74 coureurs restant s’élancent vers Chamonix qu’ils doivent rejoindre en passant par Genéve. C’est dans cette étape qu’Octave Lapize, vainqueur du Tour de France 1910, abandonne.

Les arrivées à Chamonix ont eu lieu dans cet ordre :
1er : Charles Crupelendt (La Française) sur bicyclette Alcyon en 11 h 46’
2 : Louis Heusghem (Alcyon) à une minute
3 : Gustave Garrigou (Alcyon) à six minutes
4 ; Emile Georget (La Française) à sept minutes
5 : François Faber (Alcyon) ) seize minutes

Aviation : L’aviateur Loridan bat le record d’altitude détenu par Legagneux en atteignant sur l’aérodrome de Chalons, une altitude de 3280 mètres. Pour l’anecdote, il mit 1 h 27’ pour atteindre cette « fabuleuse altitude ».
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