jeudi 26 avril 2007

« Enfin le grand jour »

Dimanche 22 avril 2007 :
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Je reviens avec du retard sur ma journée électorale du 22 avril 2007, le temps de digérer les résultats et de cuver le champagne sablé ce soir là.

18.50 % en national, 14.40 % sur Vitrolles … un score historique dans les deux cas et une UDF désormais à la croisée des chemins et courtisées par tous.

Ceci dit, je me suis aperçu du succès de ce blog en entendant et les louanges et les demandes le concernant. Tout le monde voulait savoir ce qu’il s’était passé dans mon bureau de vote, et bien je vais vous le dévoiler dans quelques lignes.

Tout d’abord, quelques anecdotes sur le bureau en général.

Je fais une petite erreur de casting en quittant mon domicile ce matin là. Ne sachant pas trop ce qui m’attend, j’enfile ma veste de photographes qui a l’énorme avantage d’être bardé de poches. Une pour le portable, une pour le portefeuille, une pour la monnaie, une pour un livre de poche (au cas où), une pour … Au bout du compte, je ressemble plus à un militant du CPNT que de l’UDF. Cette image me collera à la peau toute la journée, à commencer par la présidente du bureau de vote qui me lance, perfide : « En vous voyant, j’ai cru que Nihous avait délégué quelqu’un ! »

Je passerais sous silence le fait que ce bureau, perdu au milieu du quartier de la Plaine, était mal indiqué, comme son homologue de la maternelle, entraînant un nombre élevé d’erreur et autant de récrimination de la part de personne, de bonne foi, mais mal dirigé par la seule flèche très mal placée. A ce propos, il faudrait peut être faire œuvre de pédagogie pour expliquer que la majorité des personnes présentes dans un bureau de vote sont des bénévoles et ne sont pas rétribués par qui que ce soit. Pas la peine de nous crier dessus parce que le fléchage est mal fait ou que l’accès est difficile pour les handicapés ou les personnes âgées.

Par contre, en arrivant là-bas vers huit heures moins le quart, je ne pus m’empêcher de remercier William (à moins que ce ne soit Joseph) de m’avoir nommé en ce bureau. La première personne sur qui je tombe en pénétrant dans l’école est Jean-Marie Le Camus. Je ne le connais pas personnellement, mais outre son appartenance politique (PS), je sais surtout qu’il est le président du Rugby Club de Vitrolles. Bien évidemment, quelques minutes plus tard, nous sommes en grande discussion, parlant plaquages, cadrage/débordement, rucking, combinaison 89, au grand dam du délégué représentant l’UMP qui me jette des regards noirs, pensant probablement que nous sommes déjà en train de nouer des alliances électorales.

Comme durant la plupart du temps, je me retrouverais assis à côté de lui, il aura tout le temps, à mi-voix bien sûr, d’essayer de me convaincre, lorsque les électeurs nous laissent un peu seul, que Nicolas Sarkozy est le bon choix, que Christian Borrelli est Dieu et que l’association « Vitrolles Unie » est le seul avenir pour notre ville.

La matinée nous laisse rapidement entrevoir que le vote va être massif. La moyenne d’âge des électeurs est plus proche du troisième âge que de l’adolescence. Les deux piles de bulletin de Sarkozy et de le Pen diminuent à vue d’œil. Il ne fait aucun doute de l’appartenance politique de nos électeurs : droite et extrême droite.

Mais, en fin de matinée, la tendance change et, soudain, les jeunes débarquent : probablement un car au vu du nombre impressionnant de personnes qui envahit soudain notre repaire. Le délégué UMP et moi-même, qui opèrent à ce moment là, sommes littéralement assailli de questions. Et là, surprise. Il ne fait aucun doute que la majorité des jeunes présents à ce moment là vote pour la première fois.
-Doit-on prendre plusieurs bulletins ?
-M’sieur, je fais quoi de ce truc ? (l’enveloppe)
-T’es keuf que tu me demandes si j’ai des papiers ?
-C’est qui ça Ticarvi je sais pas quoi ?

Nous improvisons un magnifique duo explicatif qui nous resservira plusieurs fois dans la journée sur la manière dont ils doivent procéder. Conséquence, tous prennent consciencieusement un bulletin de chaque candidat avant de gagner dans une joyeuse bousculade les isoloirs.

Je ne peux m’empêcher de me poser la question : Ces jeunes qui votent pour la première fois connaissent-ils seulement la nature et la valeur de leurs engagements et les répercussions du petit papier plié qu’ils ont mis dans l’urne.

A peine le « car » parti, j’improvise une technique qui va porter ces fruits. Nous avons remarqué dans la matinée que presque tous les électeurs prennent un bulletin de chaque candidat en commençant par le candidat numéro 1, Olivier Besancenot. J’attends tranquillement qu’ils prennent le bulletin numéro 4, celui de François Bayrou, avant de dire, l’air de ne pas y toucher « Vous savez, vous n’êtes pas obligé de tout prendre. Juste celui pour lequel vous voulez voter et un ou deux autres, cela suffit amplement ! » Et ça marche ! Enfin presque, parce une fois sur deux, ils prennent aussi celui de Ségolène Royal. Mon petit camarade de l’UMP fulmine gentiment mais ne peut faire grand chose.

Il aura plus tard l’occasion d’un peu plus fulminer quand, pour échapper au soleil, nous nous mettons en bout de table. Je vous jure que je ne l’ai pas fait exprès mais je me retrouve à côté des bulletins de Nicolas Sarkozy et apparemment ma carrure semble intimider. Peu se risque à prendre ce bulletin là. Et mon ami UMP de me demander par trois fois de changer de place …

Pour mémoire, cette tactique ne sera pas vraiment payante puisque dans ce bureau là, Nicolas Sarkozy fera un très bon score de 36.27 %.

Le repas de midi est aussi l’occasion d’une franche partie de rire. Durant la matinée, le délégué UMP, encore lui, m’a fait part de son indignation devant le « nouveau scandale » qui a éclaté à l’occasion de ces élections et qui touche « cette municipalité socialo-marxiste remplie d’incapables ». Ce « nouveau scandale » est dû au fait que les délégués politiques n’ont pas de plateaux repas fournis par la Mairie à l’inverse des assesseurs, secrétaires et présidents des bureaux. J’évite de dire que je ne vois pas trop où se trouve le scandale. Marseille dont la municipalité est loin d’être « socialo-marxiste » est dans le même cas, tout comme Aix en Provence, ce bastion de la gauche ! Très fier, il m’explique qu’il a fait un papier assassin sur le blog de « Vitrolles unie » et que ce papier, démontrant « l’incurie de la municipalité », va très certainement la faire tomber (J’exagère à peine la conclusion).

Donc, à midi, les plateaux repas arrivent. Très gentiment, la Présidente puis le délégué PS qui a réussi à gratter un plateau supplémentaire à la cantine roulante, me proposent de les partager avec eux. Connaissant l’origine de ces plateaux, je préfère m’abstenir (déjà !) et me rabattre sur les croissants achetés le matin.

Idée lumineuse ! Tous les bénéficiaires des plateaux y touchent à peine, se plaignant de leurs mauvaises qualités. Les qualificatifs vont de « immangeable » à « quasiment infect » en passant par « carrément mauvais ».

Finalement, Guy Obino a eu une très bonne idée de ne pas donner de plateaux repas aux délégués politique. Au vue des réactions épidermiques de certains, je suis persuadé que sur un certain blog, il aurait été accusé de tentative d’empoisonnement s’il nous avait fourni ce repas !

L’après-midi est longue mais animée. Quelques petits incidents émaillent nos longues heures de veille :
- une électrice inscrite deux fois (habitant à un angle de rue avec une entrée dans chaque rue, une carte différente a été envoyée à chaque adresse)
- un électeur radié par erreur qui fait le déplacement au tribunal pour se refaire inscrire et nous présente, après un aller-retour éclair, l’extrait de jugement établi quelques minutes plus tôt l’autorisant à voter
- une mamie arrivant de sa maison de repos de la Roque d’Antheron en ambulance après que la procuration donnée à sa fille a été refusée car mal établie

Enfin, le bureau ferme et le dépouillement peut se dérouler. La longue litanie « Sarkozy », « Sarkozy », « Le Pen », « Sarkozy », « Royal » me donne rapidement le bourdon. Heureusement que durant les deux heures que dure le dépouillement, j’entends quatre vingt dix huit fois François Bayrou …

En 2012, j’espère l’entendre plus souvent !

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