vendredi 7 mai 2010

Grèce : j’aurais aimé avoir tort !

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Vendredi 7 mai 2010 :
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Tôt ou tard je me devais d’aborder le problème de la Grèce. Je vais donc le faire aujourd’hui même si je n’ai pas le cœur à cela.
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Les pouvoirs grecs ont donc pris la décision d’un plan drastique pour tenter de sauver ce qui peut l’être et répondre aux demandes de ses sauveteurs. C’est du moins comme cela qu’ils nous le présentent.
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Pourtant, tous les signes avant coureur d’une crise sans précédant étaient déjà là depuis longtemps, au point que le 10 décembre 2008 j’écrivais : « Je connaissais le malaise grec actuel mais je ne pensais pas qu'il était autant généralisé. Les émeutes qui ravagent les villes grecques, témoignent des déséquilibres d'une société passée en quelques années des Balkans à l'Europe. En effet, comment oublier que la Grèce a montré la voie de la transformation d'une dictature en démocratie tout en acceptant de cohabiter pacifiquement avec un voisin qui fut son occupant et son ennemi cinq siècles durant ? Comment oublier le passage en force d'une économie agricole ancestrale en une économie d'avant-garde tout en faisant cohabiter un patrimoine exceptionnel avec des lois mercantiles agressives ? »
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Pire, toujours dans le même article, j’écrivais aussi : « La « génération aux 600 euros » est dans la rue et clame sa rage devant l’injustice de cette société qui les exclue. Pourquoi « génération aux 600 euros » ? Car elle correspond aux salaires proposés aux jeunes actuellement en Grèce, souvent surdiplômés, mais qui ne trouve par leur place sur le marché du travail. On en arrive à des situations aberrantes où les étudiants restent à l'université au-delà de leurs 30 ans pour ne pas se retrouver sur le marché du travail. »
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Ma conclusion était sans appel : « Il en est incapable (de ramener le calme) car à bout de course, miné par la corruption, le clientélisme, le favoritisme. Les tragiques incendies de l'été 2007 avaient déjà montré incapacité à gérer une crise majeure. Mais ce qui est plus grave, c'est que ce constat n'est pas propre à la Nouvelle Démocratie (Conservateur), actuellement au pouvoir. Le PASOK (socialiste) est autant sinon plus atteint des mêmes travers. Et ce qui fait descendre aujourd'hui les grecs dans la rue, c'est un terrible constat.
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Ce terrible constat, c'est que le pouvoir est partagé entre trois ou quatre « clans » (les plus connus étant les Karamanlis, Mitsotakis et autre Papandréou) qui profitent d'un système sans songer à vouloir le réformer. Clientélisme, népotisme et corruption restent la réalité quotidienne des Grecs, malgré toutes les promesses faites durant des années pour combattre ces fléaux. La suite ininterrompue de scandales financiers et la publication des sommes astronomiques distribuées à quelques élus ont fini de saper le peu de crédibilité qu’il restait aux politiques.
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La crise sociale explique, sans les justifier, les violences de ces derniers jours. Le gouvernement grec peut restaurer la paix mais il est malheureusement beaucoup trop faible pour s'attaquer aux racines du mal »
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Or, dix huit mois plus tard, que constatons nous ?
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Pour réduire le déficit public de 30 milliards d’euros dans les trois ans, le gouvernement grec a pris des mesures sévères via notamment un relèvement du taux principal de TVA de deux points, une hausse des taxes sur les carburants, le tabac et l’alcool et des coupes claires dans les salaires de la fonction publique et les retraites. Les impôts indirects seront augmentés, et les salaires des fonctionnaires réduits.

Donc, ce pouvoir grec, toujours aux mains d’une oligarchie s’appelant cette fois-ci Papandreou, que ce pouvoir grec, plutôt que de s’attaquer aux racines du mal, préfère se tourner une nouvelle fois vers les plus faibles, les retraites, les fonctionnaires, plutôt que de s’attaquer frontalement à la fraude fiscale, sport national, qui représente un manque à gagner inimaginable
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Pour faire un raccourci facile et parlant : tout Grec faisant du business fraude, de l’armateur au vendeur de sandwich devant le Parthénon, de l’employé de banque au conducteur de taxi. Anecdote : essayez d’obtenir de la part du commerçant où vous venez d’acheter vos dernières chaussures un simple ticket de caisse ! Par curiosité, amusez vous dans une boutique de mode d’un grand styliste, à acheter un t-shirt et à négocier le prix en proposant de le payer en liquide hors taxe.
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Outre la tragédie de la banque d’Athènes dont l’incendie a fait trois victimes, un centre des impôts a aussi été incendié. Heureux hasard, c’était un centre traitant les dossiers litigieux et surtout les fraudeurs !
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Dans ce contexte, comment classifier une mesure qui touche la fiscalité et plus encore la TVA que paye les seuls grecs … non fraudeurs ? Plutôt que d’augmenter la fiscalité, donc faire payer encore plus ceux qui ne trichent pas, ne vaudrait-il pas mieux récupérer l’argent chez ceux qui fraudent ?
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Les fonctionnaires ne sont pas mieux lotis. La corruption et le clientélisme ont lentement miné ce secteur, à tel point que, début mai, le président de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) d'Athènes estimait que personne ne connaissait leur nombre exact. La fourchette évalue de 14 à 24 % de la population active ! Une marge d’erreur quasiment du simple au double ! La corruption de fonctionnaires est aussi un sport national et la section grecque de l'ONG anti-corruption Transparency international estime que le problème a empiré en 2009, atteignant un montant de 790 millions d'euros de dessous de table.
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Paradoxalement, tout ce système, loin de se résorber avec les mesures draconiennes et les promesses gouvernementales, risque de se développer, car les grecs se retrouvent dans un dilemme simple : dépenser moins ou travailler plus pour survivre. Et travailler plus ne pourra s’entendre qu’en essayant de trouver un deuxiéme travail d’appoint – au noir, si possible – qui leur permettra de mettre un peu de beurre dans les épinards.
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Pour terminer cet article, une simple information pour vous faire un peu réfléchir. Le déficit public de la Grèce doit être réduit de 30 milliards d’euros dans les trois ans. Les médias économique grec évaluait avant la crise le montant annuel de la fraude fiscale grecque a … 20 milliards d’euros !
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Sans commentaire !
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