dimanche 5 septembre 2010

L’info du dimanche : 22 Quicks Halal

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Dimanche 5 septembre 2010 :
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La rubrique dominicale de mon blog, « l’info du dimanche », cette information locale, régionale ou nationale glanée dans la presse et qui m’a fait bondir de colère ou de joie durant la semaine.
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L’info du dimanche a aujourd’hui pour cadre la polémique sur le passage au Hallal de quatorze nouveaux Quick portant à 22 sur 356 le nombre de restaurants spécialisés dans ce type de produit, représentant désormais 6% du réseau de Quick en France métropolitaine.
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Soucieux de ne pas se voir accuser de discrimination, Quick a décidé de proposer, dans un avenir proche, à la vente dans ces restaurants exclusivement halal un hamburger traditionnel qui ne sera toutefois pas préparé sur place, mais seulement réchauffé.
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Après avoir déclenché une polémique à Roubaix en début d'année, la chaîne de fast-food prend le risque de se heurter à la grogne des élus locaux, certains ayant jugé la démarche de Quick discriminatoire et favorisant le communautarisme.
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Pour ma part, juste histoire de mettre un peu d’huile sur le feu, à quand des Quicks qui proposerons uniquement des sandwiches à base de poisson le vendredi ?
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Sur ce, bonne lecture
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Au Quick de Montreuil: « Quoi? J'ai mangé halal ? »
Par PHILIPPE BROCHEN – Libération – 2 septembre 2010,

Il est midi trente ce mercredi au Quick de Montreuil. De longues files de clients affamés stationnent devant les caisses du fast-food. La routine? Oui. Sauf que ce 1er septembre n'est pas un jour comme les autres dans ce restaurant. Comme treize autres de l'enseigne française, le Quick de Montreuil ne sert désormais plus que de la viande halal dans ses sandwichs. Mais tout le monde n'est, semble-t-il, pas au courant de cette mutation.

«Où est ce que c'est écrit?»

«Quoi? Vous voulez dire que j'ai mangé halal? Carrément? Vous êtes sûr?» tousse Cathy, 43 ans, qui finit de déjeuner avec sa collègue Laëtitia (photo), 46 ans. «Je ne savais pas. Où est ce que c'est écrit?» On lui désigne l'affichette sur la porte d'entrée du restaurant. «Je l'ai pas vue. Ils pourraient quand même le préciser de façon plus visible.» Les deux costumières y devinent «un malaise».

«Il y a un truc pas clair. Qu'ils aillent au bout de leur truc, s'emporte Cathy. Si c'est aussi franc du collier que cela, ils doivent faire une campagne de pub pour avertir leur clientèle. C'est ça qui me gêne, entre autres. Il y a un truc pas clair, un peu faux cul.» Elle réfléchit. «Moi, je suis contre tout ce qui s'apparente à un ghetto. Le problème ici, estime-t-elle, c'est qu'après on fait des amalgames de tout. C'est pas bon. On est encore dans un pays laïque, non?»

«Ca ne change rien pour moi»

Sophie finit son repas avec son fils. Elle aussi ignore qu'elle a mangé halal. «Je ne suis pas musulmane mais ça ne me dérange pas», dit cette trentenaire montreuilloise.

Même tonalité dans la bouche de Christophe, 33 ans, qui emporte son déjeuner dans un sac en papier. «Non, je ne savais pas. Mais ça ne me choque pas particulièrement. Je vais vous dire: ça ne change même rien pour moi. Je reviendrai.»

Hakim, 40 ans, est lui attablé à la terrasse du Quick. Mulsulman pratiquant depuis trois ans, il fait le ramadan. Et se passera donc de déjeuner. «De toute façon, je n'aime pas les fast-food. Moi, je suis plus plats traditionnels.» Il a amené sa fille de 5 ans et demi croquer ses frites préférées. «Emma ne mange pas forcément halal. D'ailleurs, je ne savais pas que c'était tout halal, ici. D'ailleurs, je trouve qu'ils devraient proposer les deux, halal ou pas. Parce que là, c'est favoriser une partie sur une autre. Et on ne laisse pas le choix aux gens», estime ce transporteur.

Algérien de naissance, Hakim vit en France depuis dix-sept ans. Il interroge sur les endroits où ont ouvert ces Quick halal. «Je suis sûr qu'il y en a beaucoup en Seine Saint-Denis, non?» Oui. Cinq sur les dix qui se sont mis au halal en Ile-de-France se trouvent en effet dans le 93. «Ah ben oui! se marre-t-il. C'est pas dans le XVIe ou à Neuilly qu'ils en ouvrent, j'imagine!» Il imagine bien.

«Moi, ma religion, je ne l'amène pas au restau»

A quelques mètres, Guy, Montreuillois de 52 ans, boit un café à la terrasse du Quick avec Danielle. Il est assez remonté quand on lui apprend la conversion du restaurant à la viande halal. Mais tente de contenir sa pensée, à défaut de pouvoir la masquer. «Franchement, ça me gêne. Ca va encore stigmatiser la Seine-Saint-Denis. Même si le but est évidemment commercial, pour se démarquer de son concurrent McDo, le risque, c'est de faire des restos communautaires.»

On lui glisse qu'il est libre de ne pas fréquenter ce lieu privé. Et aussi que nombre de restaurants halal ouvrent chaque jour sans créer d'émotion particulière. Il réfléchit. Et lâche, du bout de la langue: «Mais Quick, c'est français, non?» On confirme. La chaîne appartient même à une filiale de la Caisse des dépôts et consignations. «Donc, là, c'est un restaurant occidental qui opère un virage vers une nourriture religieuse. Ca me gêne. Parce que moi, si je suis catholique, je suis aussi laïc. Et ma conscience religieuse, je ne l'amène pas au restaurant. C'est un tournant qui symbolise bien l'époque dans laquelle on vit.» On lui demande de préciser. «Eh bien l'islam prend de l'ampleur dans nos vies et et de plus en plus de place dans notre quotidien sans qu'on l'ait décidé.»

A ses côtés, Michelle acquiesce et juge la mutation de Quick «super dangereuse». «Ca conforte ces populations dans la différence. Et puis le problème ne se pose pas uniquement chez Quick, mais aussi dans les cantines scolaires par exemple. Combien ne servent plus de porc? questionne-t-elle. Pourquoi? Ce n'est pas normal. On a toujours mangé du jambon dans les écoles françaises.»

«Le chiffre d'affaire a été doublé»

Eric Azan, propriétaire franchisé de ce Quick «depuis dix ans», n'a pas d'états d'âmes de ce type. Il se défend de faire du prosélytisme. «De par mes origines (juives, ndlr), je n'ai évidemment pas le sentiment de faire le jeu du communautarisme musulman.»

Il ne le cache pas: sa seule religion en l'état est celle de son tiroir caisse. «Les huit Quick qui ont testé l'offre commerciale halal depuis octobre ont doublé leur chiffre d'affaire.» Du coup, Eric Azan annonce avoir déjà embauché «vingt nouveaux employés en CDI» en prévision de cette croissance. Sont-ils musulmans? «Ce critère ne rentre pas en compte dans le recrutement.»

Cette mutation au halal, «Quick me l'a proposée et je l'ai acceptée. J'aurais très bien pu refuser», assure le franchisé. Son établissement a été sélectionné pour cette opération par Quick France après une analyse de ses ventes. «Le constat a été fait que l'on vendait beaucoup de sandwichs à base de poisson à l'inverse de ceux avec du bacon, et qu'il y avait un fort changement d'activité en période de ramadan.»

«C'est un Quick comme les autres»

Le discours est fluide et assuré, mais pas toujours d'une énorme cohérence. Ainsi, Eric Azan se défend de vouloir attirer spécifiquement une clientèle musulmane. «Ca n'est pas dans ce sens que cela a été fait. C'est un Quick comme les autres. Notre offre s'adresse à l'ensemble du public, le restaurant n'est fermé à personne.» C'est pour cela qu'il ne «trouve pas étonnant» d'ouvrir son enseigne halal en plein ramadan. Et s'il ne propose pas de viande non halal, c'est «parce qu'il aurait fallu doubler la taille de la cuisine. Je n'en ai pas la possibilité.»

Quand on s'étonne du manque de publicité faite autour de cette mutation, à la fois à la télévision et sur les panneaux dans les rues, le propriétaire insiste sur les - discrètes - affichettes présentes sur les portes d'entrée (photo) et sur les certificats halal affichés derrière une vitre dans la salle de restauration. Non, l'absence de grandes affiches annonçant l'opération n'est pas le signe qu'il craint de se couper de la clientèle non-musulmane. «Pas du tout», repète-t-il à l'envi, sans avancer toutefois d'argumentaire. Tout juste reconnaît-il, avec un petit sourire malicieux, à propos du bouche-à-oreille communautaire: «Oui, il semblerait que cela marche!»
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